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Le conseil constitutionnel poursuit sa politisation

Si on en croit la presse, le choix des trois personnalités qui devront être nommées prochainement au conseil constitutionnel est fait. Et ce seront trois personnalités politiques, anciens parlementaires. C’est la poursuite d’une évolution pour l’institution, qui mérite qu’on s’y arrête.

Le Conseil est conçu, dès le départ, comme un régulateur politique, chargé du contentieux électoral, et d’un contrôle destiné à protéger le gouvernement, notamment face au Parlement. Si l’institution s’est progressivement émancipée, elle a gardé ses fonctions d’origine dans son ADN. Depuis 2010, et la mise en place de la QPC, l’activité s’est beaucoup enrichie, et s’est rapprochée du travail réalisé par les différentes cours constitutionnelles. Au point que, dans sa communication, Laurent Fabius insistait beaucoup là dessus. Le débat sur cette évolution est d’ores et déjà tranché, sans avoir vraiment eu lieu.

En effet, la vague de nominations qui arrive règle la question, avec à l’issue pas moins de 7 anciens parlementaires sur 9 membres. Les deux non politiques sont des magistrats. Autant dire qu’on est très loin des normes admises pour la composition d’une cour constitutionnelle, qui demande une grande majorité de juristes. Des vrais juristes, qui ont exercé en juridiction, pas des politiques qui ont fait des études de droit, il y a longtemps, et ont juste siégé dans une commission des Lois. Le regard sur les dossiers sera donc nécessairement politique. Ce n’est pas à l’âge où on entre au conseil constitutionnel qu’on change de point de vue. Pour ce qui est de la compétence, je ne me prononce pas, mais le doute est permis, au moins pour certains.

Cette vague pourrait aussi fragiliser l’autorité morale du conseil, qui est pourtant un atout majeur, quand on est un régulateur. Avec le départ de Laurent Fabius, il n’y aura plus aucun représentant de la gauche et les anciens élus du bloc central auront une large majorité. Un magnifique angle d’attaque pour tenter de discréditer les décisions, en mode « complotiste », en instillant le doute, sans le moindre élément concret. Et cela fonctionnera, malheureusement. En plus, la nomination de Richard Ferrand, considéré comme un très proche du chef de l’Etat, ne manquera pas d’être assimilée à du copinage, donc illégitime. Même si c’est la norme pour la nomination du président de l’institution (on pense à Debré ou Fabius), il n’est pas certain que ce qui passait il y a 15 ans, soit toujours acceptable aujourd’hui, dans un contexte politique beaucoup plus difficile.

Encore un indice d’une mauvaise santé de nos institutions démocratiques.

10 réponses sur « Le conseil constitutionnel poursuit sa politisation »

On est également stupéfait de la faiblesse des nominations proposées par Emmanuel Macron : Mezard et Gourault étaient des seconds couteaux, qu’il fallait exfiltrer du gouvernement. Ferrand n’est pas connu pour être un grand juriste, ni une autorité morale.
Plutôt qu’avoir une stratégie constitutionnelle, chacune des trois autorités de nomination tente par son choix de régler des petits problèmes internes. C’est navrant.

Petite question concernant l’organisation du conseil constitutionnel: est-ce qu’ils ont de l’aide interne ou externe dans le choix de la décision et la rédaction de celles-ci ? Je pense à des juristes spécialisées dans le droit constitutionnel par exemple.
Si vous avez la réponse, je suis preneur 🙂
Merci encore

Oui, il y a un service juridique et un service de documentation. Ils sont très performants, mais bien peu nombreux. Et ils ne font que proposer, ce sont les membres qui décident.

Bon, après Laurence Vichnievsky a quand même été magistrate. Je fantasmais pour ma part d’une nomination du Professeur Dominique Rousseau à la présidence du conseil constitutionnel. Mais je me doutais bien que ça n’arriverait pas.
Richard Ferrand est un mauvais choix à mon goût.

Il y a trop de droit, çà part dans tous les sens, on y comprend rien. Il ne faut pas des spécialistes du droit, qui vont multiplie les arguties juridiques spécieuses, mais des spécialistes du bon sens.

Le bon sens s’acquiert sur le terrain. Et on va sur le terrain en faisant des déplacements en province quand on est ministre, ou des allers-retours en circonscription quand on est parlementaire. Même dans la sélection des spécialistes du bon sens, on a privilégié le bon sens. Cela va dans le bon sens.

Le bon droit n’est pas fait d’arguties. Au contraire, le propre du bon droit, particulièrement lorsqu’on parle de droit constitutionnel, c’est de poser de grands principes à la fois souples et intangibles.

Il n’y a rien de pire que le « bon sens ». Le vôtre n’est pas le mien qui n’est pas celui d’Authueil, etc.
Ce que vous appelez des arguties, c’est ce qui permet la nuance et le respect de nos principes.

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