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Macron scie la branche sur laquelle il est assis

Le président sortant, Emmanuel Macron, s’est donc déclaré candidat à la dernière minute, l’avant-veille du jour où la liste des candidats est officialisée. Il vient de faire sa première « sortie officielle » comme candidat, dans une ville dirigée par un proche, et où les « questions » étaient préparées à l’avance, et posées par des proches dudit maire de la ville. Et voilà que ce même candidat-président annonce qu’il ne participera pas aux débats avec les autres candidats avant le premier tour, après avoir brillé par son absence lors de la « pré-campagne ».

On ne peut pas dire qu’Emmanuel Macron se mette en risque. Il est le sortant, et bénéficie de la guerre en Ukraine, qui amène le pays à faire bloc. Il est en situation d’être confortablement réélu, sans avoir à s’exposer, ni à prendre trop d’engagements (à part ceux qu’il a choisi de prendre). Il n’a même pas besoin de rechercher des alliances. De toute manière, il n’a personne à qui s’allier. Il a fait ce qu’il fallait pour assécher ceux qui auraient pu être des alliés, pour en faire des zombies (le PS) ou des vassaux (Horizons, le spin off de l’aile modérée de LR), en piétinant allègrement les corps intermédiaires.

Le système est en liquéfaction, et au lieu de chercher à le revitaliser, Emmanuel Macron a accéléré, depuis 2017, cette déliquescence, sans rien construire à la place. Cette manière d’agir montre qu’il n’est pas, au fond, un démocrate, que c’est avant tout un homme de pouvoir, dont le but est de gagner et de rester en poste. C’est un problème majeur, en achevant de dévitaliser ce qui reste de processus démocratique en France, il scie la branche sur laquelle il est assis.

Le risque est l’entropie politique, déjà bien avancée, se poursuive, voire s’accélère, et que le gouvernement ne soit plus qu’un décor de carton-pate, qui s’écroule à la moindre secousse. Or, malheureusement pour lui, une tempête s’est levée, avec un double choc externe, la pandémie, suivie d’une crise géopolitique majeure, qui risque de nous faire entrer en récession. Les années qui viennent risquent d’être terrible, la crise ukrainienne étant en train de refermer le piège dans lequel le Covid nous a placés.

Il n’y a rien de pire qu’un choc externe pour un gouvernement en manque de légitimité politique. En 1848, la monarchie de Juillet s’est écroulée en quelques jours, pleurée par personne, dans un contexte de récession économique. Pareil pour le Second Empire, tombé à la suite d’une défaite militaire. Dans les deux cas, le pouvoir en place avait négligé son assise et le travail d’adhésion de la population. Tant que les choses allaient bien, les gens ne disaient rien et laissaient le dirigeant gouverner. Et le jour où la tempête a soufflé, les citoyens ont regardé le régime tomber, sans lever le petit doigt pour lui venir en aide.

A bien y regarder, Emmanuel ressemble à un mélange de Louis-Philippe et de Napoléon III. Il a la morgue du « enrichissez-vous » de Guizot, en réponse aux demandes d’extension du droit de suffrage, et la verticalité de l’exercice du pouvoir d’un Napoléon III, qui a voulu singer son oncle, sans avoir sa légitimité charismatique. Le 8 mai 1870, Napoléon III remporte très largement un plébiscite, se croit relégitimé pour 20 ans. Le 4 septembre, la République est proclamée, deux jours après que ce même Napoléon III ait été fait prisonnier à Sedan.

Je dois avouer que dans le contexte sombre que j’entrevois, je ne suis pas rassuré sur l’avenir de notre démocratie. Il va peut-être falloir se préparer à des jours politiquement difficiles, dans moins longtemps qu’on ne le croit.

19 réponses sur « Macron scie la branche sur laquelle il est assis »

Une très forte abstention/vote blanc (disons supérieure à 60%) les aideraient-ils, Macron et certains autres, à prendre conscience de ce risque ? Et à trouver des solutions afin de relégitimer notre système démocratique ?

Vote blanc ??? Non mais vous avez rien compris c’est le but recherché il faut ABSOLUMENT aller voter alors tous aux urnes 🗳 c’est impératif !!!

Que nenni ! Je pense que la légitimité est une notion qui leur est inconnue. Tant qu’ils ont l’apparence de la légalité assurée par le processus électoral. Bref, aller demander la solution à des gens qui accélèrent un processus n’est pas raisonnable. La refondation viendra de l’extérieur.

Une refondation venant de l’extérieur implique un rapport de force avec le système de pouvoir actuel. Cela veut dire qu’il faudra en passer par une sorte de révolution non ?

Vous êtes trop dur avec Napoléon III, qui n’a sûrement pas singé son oncle et qui ne manquait ni de charisme ni de courage, et encore moins d’un bagage intellectuel. Un régime certes fort et policier mais avec une très forte opposition politique et son « parti » n’a jamais été majoritaire à la Chambre (et on passe sous silence son autorisation des syndicats). Un mélange de politique dynastique et nationale (échec au Mexique, réussite en Crimée et en Asie), mais surtout une politique économique qui industrialise enfin le pays. Mais il y a la maladie, le poids du nom, l’erreur d’appréciation d’Ems … et donc Sedan et la captivité.

Certes la République est proclamée (parisocentrisme classique) mais le pays n’est pas républicain comme le montre l’élection suivante et tous les compromis avant les lois constitutionnelles de 1875. Il y a juste vacance.

Malheureusement, il ne pourra pas y avoir de débat télévisé à quatre ou cinq, pour plusieurs raisons (volonté du Président, « petits » candidats écartés) qui pourrait permettre d’aborder les sujets demandant des décisions. On va rester dans la situation que décrit M. Gauchet dans son second volume du Malheur Francais. Deux élections présidentielles flinguées … Comment échapper à une résurgence des Gilets Jaunes ?

Oui, je suis dur avec Napoléon III, car c’est un médiocre qui a réussit parce que « neveu de ». Lorsqu’il est tombé, personne n’a levé le petit doigt, en province, pour contester la proclamation de la République, et les élections de 1871 n’ont pas une victoire de bonapartistes, montrant bien que le pays profond n’était pas franchement en faveur du régime, dès qu’il a eu un choix autre qu’en l’ordre établi et des oppositions disparates, et pas si puissantes que ça.

Pauvre Napoléon III. On lui doit la réfection de Paris, et surtout l’annexion de Nice et de la Savoie… Je ne comprends pas qu’on lui reproche toujours la perte de l’Alsace et la Lorraine et qu’on oublie toujours Nice et la Savoie.

d’un autre coté ces débat où les candidats s’invectivent plus qu’ils ne débattent sont ils réellement utile ? Rappelez vous celui du second tour où on a vu un chien hargneux aboyant… C’était tout sauf un débat. Et puis les programmes et les positions des différents candidats sont connus ? Non ?
Le problème aujourd’hui n’est pas tellement Macron mais les oppositions qui ne proposent finalement pas grand chose. La gauche: inexistante. Le PS n’a pas su se reconstruire. LFI est dans un extrémisme qui peut faire aussi peur que RN. Les ecolos entre le wokisme et leurs querelles interne ? Et à droite. ils se font bouffer par le duo des affreux (RN/Le pen) et LREM. Leur programme c’est du Macron dans les grandes lignes. je ne parlerais pas de RN et Zemmour qui idéalisent une France qui n’existe plus.

Les débats télévisés sont effectivement pitoyables et n’apportent rien. En revanche, les échanges et analyses approfondies sur les programmes (qui prennent du temps) sont utiles. Comment voulez que cela se fasse correctement, quand le sortant et grand favori présente son programme le 20 mars, pour un premier tour le 10 avril ?

Mais les programmes c’est pareil. Citez moi un candidat qui a respecté son programme sachant que ces derniers sont souvent une collection de mini mesures pour faire plaisir à tel ou tel minorité, courant d’opinion ou groupuscule ? De plus les marges de manoeuvres sont quand même très réduites une fois les salaires des fonctionnaires payées et les obligations prises par l’état engagées…

Je ne sais pas s’il faut prendre les programmes comme des engagements. A mon sens, comme nous ne sommes heureusement pas dans un systême de mandat impératif, ils sont des indications d’une philosophie, d’un chemin à prendre (la fameuse « vision »).
Ce qui à la fois ne doit pas flouer les électeurs mais aussi ne pas permettre au jeune élu de se croire investi pour tout au prétexte de son élection (qui aurait donné quitus pour tout son programme, juste parce qu’il aurait parlé de la mesure au detour d’un meeting on en sait où).

Pour les marges de manoeuvre, c’est le plus grand problème du systême politique francais. La place de l’Etat est telle en France que c’est incompréhensible qu’il ne puisse pas tout pour une bonne partie des citoyens. Un tournant comme1981 serait impossible aujourd’hui. La faute à un grignotage par le haut et par le bas, par l’UE (commerce et monnaie) mais surtout par des autorités dites indépendantes au motif qu’elles seraient plus impartiales que le gouvernement. D’où l’impression que changer les dirigeants ne change pas la politique … et pour beaucoup ce n’est pas une impression. Pour l’instant l’envie d’aventure des citoyens est assez limitée (covid, Ukraine, l’âge moyen de la population), mais rien ne dit que ca ne changera pas.

La comparaison avec la monarchie de Juillet (période beaucoup plus agitée qu’on ne le pense communément) me semble assez éloquente et riche, en effet. Il est intéressant de lire les correspondances des classes dirigeantes de l’époque pour voir quelle perception elles avaient des questions économiques et sociales.

Une galerie d’ectoplasmes proposant du vent et Macron.
C’est comme ça que je vois cette présidentielle…

il est clair que quand on lit ou écoute les 11 concurrents à Macron, il y a de quoi avoir peur parfois. Par certains que tous aient conscience des réalités du monde.

Bonjour. Il y a une hypothèse que personne ne soulève. Et qui pourtant, au vu de la situation du pays pourrait bien arriver. Et qui serait alors un sacré séisme démocratique. On n’arrête en effet pas de parler de l’élection présidentielle. Mais ou oublie de rappeler qu’un Président sans majorité à la chambre n’a que peu de pouvoir. Et si demain, Les français votaient, pour une fois, différemment à la Présidentielle et aux Législatives? Que donnerait, sur le plan politique un Président se retrouvant en cohabitation dès son premier jour de mandat?

Ce serait intéressant. Mais qui aurait la majorité, alors? La gauche est trop divisée, la droite sera ko debout si Valérie Pécresse se prend la raclée annoncée… Par contre on ne peut pas exclure qu’aucun parti n’ait la majorité absolue, conduisant à un gouvernement de coalition LaREM + LR

Mitterand pour son deuxième septennat n’avait pas eu la majorité et il avait du « gouverne »r avec le PC et une partie du centre. Mais si cela se passe comme pour le premier quinquennat de Macron,une partie des électeurs (de gauche ?) ne sont pas allés voter lui donnant de fait la majorité à l’assemblée.

Dans la conjoncture actuelle, je vois davantage une écrasante majorité pour le président à l’Assemblée, qu’une absence de majorité. Dans la plupart des circonscriptions, on risque d’avoir un candidat LREM, face à un candidat d’un extrême. L’abstention sera tellement forte qu’il n’y aura pas de triangulaire, la gauche réformiste et LR (qui va exploser au soir du premier tour) ne seront pas en mesure de faire autre chose que sauver les meubles. S’ils ont chacun une trentaine de députés, ce sera bien.

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