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Bayrou, un coup pour rien ?

Après deux semaines de gouvernement Bayrou, force est de constater que le changement par rapport au gouvernement Barnier est purement cosmétique. Une large proportion des conseillers techniques sont restés en poste, Le socle parlementaire du gouvernement est resté strictement la même et la ligne politique n’a pas véritablement bougé (si tant est qu’il y en ait une).

En fait, la censure du gouvernement Michel Barnier a juste entrainé un changement de visage à Matignon, mais rien de plus. Le blocage politique est toujours là, avec trois blocs qui se regardent en chiens de faïence. Les lois budgétaires ne bougeront qu’à la marge, n’offrant quasiment aucune voie de compromis, car arrivé à la deuxième lecture, il n’est plus possible d’introduire de mesures nouvelles. On est donc dans la même situation que début décembre, mais avec une situation plus dégradée, du fait de la censure et de l’absence de budget au 1er janvier.

On sait désormais que les députés, que ce soit à gauche ou au RN, sont capables de tout, y compris de voter des motions de censure et de bloquer l’adoption du budget. Ils l’ont fait une fois, sans manifester d’états d’âmes ou de regrets, ils peuvent donc le refaire une fois de plus. Cela augmente fortement l’incertitude pour l’ensemble de ceux qui dépendent des décisions politiques. Ce n’est plus possible de parier (comme je l’ai fait) sur le sens des responsabilités et du bien commun de nos élus. Cela a de nombreuses conséquences, problématiques pour notre système démocratique. La parole d’un gouvernement ne vaut plus rien, si sa durée de vie est de quelques semaines. Aucun calendrier législatif n’est certain. Impossible, désormais, de se projeter sur des bases à peu près sures, et donc d’investir et de faire des projets. La conséquence immédiate risque d’être un désinvestissement des différents acteurs de l’action publique, dans le travail gouvernemental et législatif. A quoi bon se décarcasser ? A quoi bon prendre des risques, alors qu’on peut se contenter de gérer à la petite semaine ? On va droit vers l’immobilisme. Tant mieux pour ceux qui ont intérêt à ce que rien ne bouge, tant pis pour ceux qui ont absolument besoin que des évolutions aient lieu.

L’absence de budget voté au 1er janvier plonge le pays dans la fragilité. La loi spéciale n’est qu’un expédient pour éviter le chaos (comme le fait de ne pas pouvoir payer les fonctionnaires), mais cela ne remplace absolument pas une loi de Finances votée en bonne et due forme. La France, depuis le début de l’année, est en fonctionnement « dégradé ». Aucun projet nouveau ne peut être lancé, seules les dépenses indispensables sont possibles. Toutes les subventions qui nécessitent une décision discrétionnaire sont suspendues, et ne peuvent pas être versées avant l’adoption d’une loi de Finance. Quand on connait la dépendance de nombreux secteurs aux aides publiques (médico-social, culture…) tout va dépendre de la bonne volonté des banquiers à ouvrir (ou pas) des lignes de trésorerie. Tant qu’il n’y a pas de loi de Finance, les collectivités locales ne peuvent pas voter leur budget, faute de connaitre les montants exacts des dotations d’Etat, qui sont devenues la majeure partie de leurs ressources. Les conséquences sont nombreuses, et pour beaucoup très mal mesurables, car nous n’avons jamais connu une telle situation. Et comme nous n’imaginions pas y arriver, aucune simulation un peu sérieuse a été faite pour évaluer l’ampleur des dégâts.

Si en plus, un choc externe survient, nous sommes vraiment dans la mouise. C’est pour cela que je regarde avec une grande inquiétude toutes les galéjades d’Elon Musk. En d’autres temps, cela m’aurait fait rire, mais à partir du 20 janvier, ce type aura l’oreille du président des USA, qui est aussi barjot que lui. Leur capacité à déstabiliser le monde est absolument effrayante.

La censure n’aura donc servi à rien, sinon à aggraver la situation du pays, avec une classe politique qui ne semble toujours pas avoir compris qu’ils amènent le pays droit dans le mur.

9 réponses sur « Bayrou, un coup pour rien ? »

Très juste. Sauf que il était évident après le 7 juillet 2024 que le budget ne serait pas voté en fin d’année et que le gouvernement qui le proposerait tomberait. Et cette issue était déjà probable avant la dissolution.

Dans mon secteur cela commence à se ressentir au niveau des projets de recrutement. Entre les incertitudes de la situation politique et le climat économique au niveau international. Bef nos politiques jouent aux cons et ce que nous perdons actuellement il n’y a aucune certitude que nous le récupérions dans les mois ou années à venir…

Bonjour.
Personnellement je ne jetterai pas toute notre classe politique « avec l’eau du bain ». Tout d’abord, durant les 3 mois qu’il a été nécessaire à Macron pour nommer un Premier Ministre il y a eu quelques surprises. Alors que l’on pouvait légitimement s’attendre à ce que les pires blocages proviennent de LFI, c’est au contraire du côté EPR et LR qu’ils sont apparus.
Ensuite, ces 3 mois auraient du servir à Macron à monter une coalition de gouvernement sur un projet commun. Quitte à y inclure de manière non-officielle le RN. Au lieu de cela elle lui a servi à essayer de monter un scénario pour « appliquer son programme, tout son programme, rien que son programme ». C’est dans ce merdier que Barnier a dû pataugé.

Là, il a fait une faute, c’est de tenter d’appliquer la « politique du susucre ». C’est à dire qu’il a pondu des PLF de rigueur extrême dans l’optique de céder sur tel ou tel point en fonction de la sensibilité de chacun des partis dont il espérait au minimum l’abstention. Cette politique, très classique en France, ne peut en fait marcher qu’avec des partis qui partagent une vision globalement similaire. Ce qui n’était pas vraiment le cas entre EPR/LR et le RN. Et comme le RN (et LFI), ne pensent qu’à 2027 (ou à une présidentielle avancée), il ne pouvait au final accepter un texte qui serait très dommageable pour leur électorat.

Bayrou en revanche est une totale erreur de casting. Tout d’abord nous aurions pu supposer que le centre (Modem) était politiquement positionné entre EPR et le PS. Or, il s’avère, aux choix des ministres, à la sujétion de la Justice par rapport à l’Intérieur, etc. qu’il se positionne en fait entre LR et le RN. Ce qui fait que la tentative d’obtenir une certaine neutralité de la part du PS, est en passe d’être un échec. Pour tout arranger, il s’avère qu’il semble incapable de comprendre les priorités du moment. Cela c’est bien vu sur sa très mauvaise gestion médiatique autour de Mayotte.

Maintenant, par rapport au PLF, et au PLFSS, la question est de savoir si Bayrou est capable soit de monter un projet avec une rigueur moindre que les projets précédents afin d’avoir une chance de la passer avec un 49-3; soit de laisser le Parlement décider du contenu de ces PLF. Si nous pensons que c’est le cas, il faut le laisser aller jusqu’à là, et le démissionner ensuite. Si nous pensons que ce n’est pas le cas, il faut le démissionner tout de suite.

Et c’est seulement si nous avons une nouvelle censure, suite à un 49-3 budgétaire que je ferai comme vous, et dirai que nous avons un classe politique (dans sa généralité) incapable de se préoccuper du bien commun.

Un « PLF de rigueur extrême » ??? Il faudrait peut-être ne pas exagérer non plus… Il n’y a eu strictement aucune rigueur, et encore moins extrême!!

Si vous vous inquiétez de Musk, j’ai une mauvaise nouvelle pour vous : Zuckerberg vient de s’aligner sur sa politique de défense de la liberté d’expression.

J’y vois personnellement une superbe nouvelle. Le débat politique a été confisqué par les progressistes à coups de censures et de subventions. Restaurer le « marché libre des idées » ne peut être que positif pour la démocratie. N’en déplaise à la gauche qui sait que ses idées ne survivent généralement pas à un débat libre.

La manière d’envisager le débat, à l’extrême droite façon Musk, n’est pas franchement ce que l’on pourrait appeler un débat « libre ». C’est plutôt un débat sans règles où « tous les coups sont permis », y compris en dessous de la ceinture, avec intimidation, violences, menaces. Rien de bon à attendre pour la démocratie !

La violence était déjà présente dans le débat, mais seule la gauche pouvait l’utiliser librement. Je viens d’un milieu universitaire où afficher un début d’opinion de droite (ou même simplement libéral au sens français du terme) sur un réseau social peut ruiner une carrière. Ce qui se passe avec Musk et Zuckerberg n’est qu’un rééquilibrage des forces selon moi.

J’ai lu votre billet dédié à cette question. Toujours intéressant, mais vraiment je pense que vous n’avez pas assez confiance dans la capacité du débat démocratique à faire émerger des solutions raisonnables plus efficacement qu’une censure contre-productive.

Vous préférez un débat public alimenté à coups de fake news ?
Ce qu’il faut pas lire ici franchement…

Le positionnement de Musk/Trump n’est pas de droite, il est dans un mensonge permanent. Et débattre avec le mensonge ne fait en rien avancer la vérité.

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