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Renoncement et inutilité des députés

Ce lundi 2 juin après-midi, la séance de l’Assemblée symbolisait magnifiquement l’effacement presque complet de l’institution dans le processus de décision.

Les députés ont commencé par approuver, à l’unanimité, une proposition visant à donner le grade de général de brigade à Dreyfus. Une proposition que personne ne demandait, qui n’apporte rien, qui n’est même pas de niveau législatif. Bref, aucun intérêt, si ce n’est de tenter d’instrumentaliser la mémoire. A défaut d’avoir des idées et des propositions concrètes, on adopte des postures. C’est le pain quotidien du Palais-Bourbon.

Ils ont poursuivi en adoptant, avec la même unanimité, la motion de rejet préalable, sur la proposition de loi visant à valider (à la suite d’une annulation en justice), le permis de construire de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres. Le sujet était pourtant intéressant, car il permettait au moins deux beaux débats, celui sur l’acceptabilité des grandes infrastructures routières, et un autre sur le droit, pour les parlementaires, d’annuler par une loi une décision de justice. Les députés ont préféré ne pas en débattre, et de laisser les sénateurs (à l’origine du texte) faire le boulot.

Enfin, le troisième texte est destiné à rattraper une grosse boulette, votée lors du denier budget, concernant l’assujettissement des microentrepreneurs à la TVA. A l’hiver, la discrète mesure gouvernementale était passée inaperçue, ce qui se comprend, puisqu’avec le 49.3, il n’y a pas de débat, donc pas de réel examen du fond. Ce n’est qu’une fois la machine de Bercy mise en branle, pour mettre en œuvre la mesure, que les intéressés se sont rendus compte des dégâts et ont sonné le tocsin auprès des élus. Après avoir obtenu la suspension de la mise en application, voilà qu’arrive l’abrogation. Réparer une erreur, ce n’est pas vraiment progresser. Vu les conneries votées dans le projet de loi de simplification, on va regonfler les stocks de conneries à réparer.

Voilà donc, le bilan de la journée réservée au groupe EPR, qui est censé être l’épine dorsale du gouvernement. Du vide, du refus de débat et du rattrapage de bévue. Ce n’est pas glorieux, et c’est malheureusement emblématique du travail parlementaire à l’Assemblée.

L’impasse politique dans laquelle nous a mis la dissolution, et le résultat des législatives ne fait que se confirmer. Il ne va rien se passer jusqu’aux prochaines échéances électorales, et la classe politique semble très bien s’en accommoder. Qu’importe que les réformes nécessaires, que les décisions à prendre n’avancent pas, tant qu’on peut faire de la politique, les yeux rivés sur les prochaines élections. Le burn-out parlementaire, que je voyais arriver en septembre dernier, est bel et bien là. La faillite de la classe politique se confirme également.

Pourtant, il va bien falloir, d’une façon ou d’une autre, voter un budget, à l’automne prochain. Pour le moment, le gouvernement et les députés semblent y aller à reculons, avec beaucoup de comm’, des grands moulinets, un diagnostic alarmant, et pas le moindre consensus sur les mesures à adopter. On va droit dans le mur, en klaxonnant encore plus fort que l’an dernier.

7 réponses sur « Renoncement et inutilité des députés »

Merci @Authueil pour ce compte rendu synthétique de séance.

J’ose deux questions :
1/ le refus de s’attaquer aux vrais problèmes, c’est de la lâcheté (on sait mais on n’y va pas) ou de la bêtise (on refuse de savoir) ?
2/ et pour en sortir, on fait comment ? (et faudra-t-il que ça dégénère pour qu’on s’attaque au problème ?)

Parce que je ne suis pas certain qu’il y ait encore beaucoup de marge de manœuvre avant qu’un accident industriel ne tourne à la catastrophe financière/politique de type « Seveso »…

De la lacheté ou de la théorie des jeux ? Qui a intérêt à améliorer la situation où prendre des risques ? Les macronistes.savent que leur chef ne passera pas 2027 et sans lui ça va être dur de repasser et encore plus si on fait passer des réformes.
Les oppositions n’ont pas intérêt a bousculer leurs clientéles et auront beau jeu de dire « C’était pas nous ».

Bref, bref pas glorieux

C’est de la strategie électorale. On ne va pas se lancer dans des projets qui demande coopérer avec tel ou tel parti. Quant il est plus simple de rester dans l’opposition en clamant des « c’est la faute de l’autre » et des « yakafokon »
Il faut rester « pur » avant les prochaines élections.

@Ares « il faut rester « pur » avant les prochaines élections… »

Puis ne rien pouvoir faire ensuite si on est en responsabilité ou ne rien vouloir faire si on reste dans l’opposition ?

Nous sommes très forts pour justifier nos renoncements et expliquer nos défaites – Marc Bloch doit se retourner dans sa tombe…

« L’absence de fonction détruit l’organe », et en disant ça je ne pense pas qu’aux députés mais à l’ensemble du monde politique.
Les mêmes qui n’en foutent pas une vont hurler à l’abstention à la prochaine élection… je sais bien que L’absence de vote est un problème de démocratie, mais encore faut-il qu’elle ne soit pas qu’une fiction !
Pour moi la France n’est pas une démocratie mais une oligarchie admnistrativo-politique où le vote existe mais ne permets pas a la population d’influencer réellement le cours de la politique menée. Ça a des avantages (cohérence des grandes orientations dans le temps) et des inconvénients (le chômage de masse structurel)

Sauf que là, l’ensemble des personnes élues, Président inclus, ne servent plus à rien !
Si pour moi Macron reste responsable de la survenue de la situation sa gestion est la responsabilité de tous les politiques. Et c’est déplorable.

Dans l’affaire Dreyfus, je me suis d’abord dit que la chose allait certainement lui faire une belle jambe au capitaine, puis je me suis demandé si les députés étaient dans leur rôle. Visiblement non.
Pour l’A69, l’agitation des députés EPR est conforme à leur conviction à la fois pro business et « progressiste ». J’ai été surpris pas la décision, apparemment assez peu motivée de la Cour d’appel administrative qui ne s’est pas fendu d’un arrêt historique sur le sujet alors que la juge du tribunal administratif avait fait un travail considérable en produisant une décision motivée.
L’affaire de la TVA concernant les auto-entrepreneurs démontre une fois de plus qu’on ne travaille peut-être pas assez à l’Assemblée Nationale, en tout cas qu’on n’y lit pas ce qu’on vote.
Ce qui affligeant car tout cela a des conséquences sur la vie quotidienne des pékins moyens dont je suis.
En résumé, ils font des trucs qui ne relèvent pas de leurs attributions, ce serait sans importance s’ils ne se plaignaient pas de burn-out, défont des trucs déjà défaits, et détricotent ce qu’ils avaient voté à cause d’un « bug » car ils se disent « absolument dé-bor-dés ».
Et chouinent qu’on les aime pas assez.
Franchement où sont les adultes ?

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