Les résultats des élections législatives sont tombés, et comme cela était prévisible, le chef de l’Etat n’y dispose que d’une majorité relative. Il lui manque une quarantaine de sièges pour arriver à la majorité absolue. Cela veut dire qu’il ne suffira pas de quelques débauchages individuels, il va falloir négocier avec un partenaire.
Tout indique que l’essentiel des discussions se feront entre la majorité (relative) présidentielle, et le groupe LR. Des discussions avec le RN sont absolument exclues. La gauche étant dominée par le groupe LFI, avec groupe EELV assez « radical », les socialistes, qui sont les plus susceptibles d’être réceptifs à certaines propositions, sont un peu coincés. Ils savent que s’ils vont trop loin, et rompent la solidarité politique sur laquelle ils ont été élus (l’ombre de la NUPES planera longtemps), ils le paieront très cher aux prochaines élections.
Le gouvernement va donc devoir trouver un accord avec la droite modérée, qui tient la clé de la sécurisation des votes à l’Assemblée, et surtout, tient aussi le Sénat. Autant dire que si LR se braque, et se range dans l’opposition ouverte, le gouvernement sera très embarrassé et devra assez vite dissoudre l’Assemblée. Non seulement ses textes seront rejetés, mais les quelques uns qui seront votés, ne seront pas nécessairement rédigés comme le gouvernement le souhaiterait. Le parlementarisme rationalisé, façon 1958, ça sert à domestiquer une majorité un peu rebelle, pas à faire adopter des textes contre la volonté d’une majorité.
Pour l’instant, nous sommes au début de la négociation, et les choses ne vont pas se débloquer d’un claquement de doigts. Les signaux envoyés sont, pour l’instant, globalement positifs, certains ténors de la majorité lançant des appels à la discussion et à l’échange avec les « élus soucieux du bien commun ». Du coté LR, c’est plus tendu, mais une majorité se retrouve sur une ligne « Aucun accord formel, mais aucun refus de principe non plus, il faut voir au cas par cas ». A ce stade, il est difficile d’en demander plus que l’expression d’une bonne volonté prudente.
Il va falloir un peu de temps pour que les LR, qui n’avaient pas vraiment anticipé cette situation, établissent leur « liste de courses » et arrêtent les positions qu’ils acceptent, et leurs lignes rouges. Cela va être un exercice salutaire pour LR, mais aussi pour LREM, qui n’avait jamais vraiment fait ce travail, et qui doit maintenant se doter d’une grille d’analyse. On en restera à des accords ponctuels, et le Graal de l’accord de coalition, ça sera pour plus tard, peut-être. Dans un système de scrutin majoritaire, on passe les accords avant, pas après le scrutin (comme c’est le cas dans les pays votant à la proportionnelle).
Je ne doute pas que ces deux structures, composées de gens raisonnables et responsables, arriveront à faire (tant bien que mal) le travail de clarification doctrinale et programmatique, et à trouver un terrain d’entente, même si cela n’ira pas sans psychodrames. Ils seront aidés, en cela, par la pression provoquée par les partis populistes, qui risquent fort de mettre de « l’ambiance » dans l’hémicycle, par une attitude militante bornée et agressive. Je crains que dans un premier temps, LFI et RN ne se lancent dans la confrontation et la surenchère démagogique, poussant encore plus LREM et LR dans les bras l’un de l’autre, l’électorat de ces deux partis (surtout LR d’ailleurs), craignant plus que tout le désordre.
Il serait imprudent, à ce stade, d’extrapoler sur un temps plus long, mais on peut penser que si les accords fonctionnent plutôt bien, une alliance de long terme peut se nouer. On reviendrait alors à un schéma connu, d’un parti dominant à droite, doté d’une vague aile gauche, et d’un autre parti, regroupant une droite plus hétéroclite, dont le ciment est de ne pas être dans le parti de droite dominant, tout en refusant de basculer à l’extrême-droite. On appellerait ça le RPR et l’UDF, et la boucle serait bouclée !
5 réponses sur « Le renouveau démocratique ? »
A priori LFI est partie pour l’opposition jusqu’au-boutiste réclamant la tête de Borne. Donc si quelque chose doit se faire, ce sera avec LR. Si cela ne se fait pas on repart pour une deuxième roulette russe électoral.
Je comprends que les discussions avec le RN seront exclues, mais que penser de certaines déclarations d’élus LREM indiquant qu’ils seraient prêts à avancer avec eux sur certains sujets ?
Il y a toujours des égarés ou des gens qui croient se rendre intéressants en balançant des inepties.
En l’occurrence, c’est le garde des Sceaux que vous soupçonnez d’égarement…
(https://www.lefigaro.fr/elections/legislatives/legislatives-2022-dupond-moretti-evoque-la-possibilite-d-avancer-ensemble-avec-le-rn-guerini-nuance-20220620)
Avec lui, on est au delà du soupçon. Draguer le RN est sa feuille de route depuis le début 🙂