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Wikipédia et la neutralité

Ces derniers jours, la Wikipédia francophone fait l’objet d’une nouvelle campagne de presse hostile, de la part du magazine Le Point, repris par la presse bien à droite, jamais en manque pour taper sur ce qu’ils considèrent comme un repaire de gauchistes.

A la base de la querelle, l’article sur Le Point dans Wikipédia. Certains journalistes (notamment Erwan Seznec) considèrent qu’il manque singulièrement de neutralité, et qu’il est entre les mains de militants, qui lui ont volontairement donné un biais négatif. Un nouvel avatar de la croisade « anti-woke » mais qui pose des questions intéressantes, malgré une manière de faire assez détestable de la part du Point.

Je vais me concentrer sur le fond du sujet, en laissant de coté les polémiques.

La question posée, à savoir le manque de neutralité de certains articles sensibles, est un réel problème, dont un nombre grandissant de contributeurs est conscient. Comme toute entreprise humaine, Wikipédia est imparfaite. Sur les articles en lien avec l’actualité politique, les biographies de personnalités ou d’entités clivantes, les concepts controversés, il y a des conflits éditoriaux qui peuvent être parfois violents. Il n’est absolument pas rare que des personnes (de bonne ou mauvaise foi, peu importe) arrivent avec une vision orientée, et entendent imposer leur point de vue sur la manière dont la fiche doit être rédigée. Dans le jargon wikipédien, on appelle cela du « Pov Pushing ». Quand c’est fait par des personnes extérieures, qui ne connaissent pas les us et coutumes de la communauté, c’est assez vite réglé. Les modifications sont annulées et la personne est mise à la porte. C’est autre chose quand le « Pov-pusher » est un contributeur aguerri, qui connait parfaitement les règles, et fait, par ailleurs du bon boulot sur l’encyclopédie.

Il faut bien reconnaitre que la communauté des contributeurs de la wikipédia francophone a eu beaucoup de mal, jusqu’ici, à traiter efficacement le problème. Nombre d’articles sensibles (Le Point est loin d’être le seul, ni le plus touché) ne sont pas au niveau, du point de vue neutralité. Nombre d’entre eux ont des sections « controverses et polémiques » longues comme le bras, occupant parfois plus de la moitié de l’article. Les sources sont parfois utilisées de manière sélective (on appelle cela du Cherry Picking dans le jargon) ou déformée, pour n’en retenir que ce que le pov-pusher veut leur faire dire. On a aussi fréquemment une reprise quasi immédiate des polémiques médiatiques, qui bien souvent sont aussi vite oubliées qu’elles ont surgi. Sauf que la page Wikipédia en garde la trace, et que c’est le premier résultat qui ressort dans Google.

Une certain nombre de personnes se plaignent du traitement qu’ils subissent, de la qualité très médiocre, voire quasi diffamatoire, de la page qui leur est consacrée. Parfois, la demande relève du ripolinage et du lissage, pour enlever des aspérités ou des informations désagréables, pourtant parfaitement sourcées et notoires. Mais parfois, elles n’ont pas complètement tort. La communauté de la Wikipédia francophone n’a sans doute pas assez pris conscience de sa responsabilité vis-à-vis des personnes concernées et de la nécessité de trouver un équilibre entre le droit à l’information d’un coté, le respect de la vie privée, et le droit à l’oubli de l’autre coté.

Le fonctionnement même de l’encyclopédie pousse à cette dérive. Tout le monde peut intervenir, et s’il y a désaccord, il faut discuter et trouver un consensus. C’est long et chronophage, et parfois, les débats s’enlisent et se terminent par abandon, celui qui a le plus de temps et d’habileté à faire trainer, l’emporte. Parfois, les débats sont rugueux, voire violents, et on ne trouve pas beaucoup de volontaires pour prendre des coups. Aller faire l’arbitre sur les pages liées au conflit israélo-palestinien est un sacerdoce, et il vaut mieux y aller avec le gilet pare-balle. Le problème est accentué par la taille, finalement assez réduite, de la communauté française, avec des débats qui peuvent se restreindre à une dizaine de personnes sur une page de discussion, et tourner en rond, sans que personne n’intervienne pour débloquer la situation, faute de règles claires.

Sur ce point, les choses bougent progressivement au sein de la communauté des contributeurs francophones. Une attention plus forte est portée à ce sujet de la neutralité, avec l’élaboration (encore embryonnaire) de recommandations et de lignes directrices pour interdire certaines pratiques, et donner ainsi des points d’appui à ceux qui luttent contre le pov-pushing. Cela fait très longtemps que je militais pour cette évolution, je suis heureux de voir que cela avance, même si on n’est pas au bout du chemin. Il continuera à y avoir des pov-pushers, qu’il faudra rappeler à l’ordre. Pour cela, il faut que des personnes s’engagent, contribuent, et y passent du temps.

Pour tous ceux qui regardent ça de l’extérieur, et se plaignent, sachez qu’il vous est possible de faire avancer les choses dans le bon sens. Taper depuis l’extérieur et faire des procès est assez contreproductif. Il vaut mieux dialoguer sur le fond, apporter des éléments tangibles, et argumenter. Même s’il est fortement déconseillé à une personne d’intervenir pour modifier la fiche le concernant, elle peut venir présenter sa position et ses arguments sur la page de discussion de l’article.

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L’irresponsabilité de la Gauche sur les plans sociaux

Le groupe écologiste de l’Assemblée nationale vient de faire demande de droit de tirage, pour une commission d’enquête intitulée « les défaillances des pouvoirs publics face à la multiplication des plans de licenciements. ». Cela m’a d’abord laissé pantois, puis m’a beaucoup énervé.

L’année 2025 va être difficile, avec effectivement beaucoup de plans sociaux en vue. Et quand on regarde un peu qui a une responsabilité dans la situation, elle est certes partagée, mais celle de la gauche française est très lourde.

Si l’économie française vacille en ce moment, elle le doit en partie à la situation politique incertaine que connait le pays depuis juin 2024. Certes, c’est Emmanuel Macron qui a appuyé sur le bouton, mais derrière, on a eu un sacré cirque avec le sketch Castets, le « rien que le programme, tout le programme », et cette affirmation, fausse mais répétée en boucle, que c’est la gauche qui aurait remporté les législatives. Si c’est la classe politique dans son ensemble qui n’ a pas été la hauteur pour chercher une sortie par le haut (qu’ils n’ont toujours pas trouvée), la gauche a largement tenu son rang !

Plus fondamentalement, la gauche française, encore largement imbibée de marxisme, passe son temps à cracher sur le secteur privé, sur les entrepreneurs et ceux qui gagnent de l’argent. Leur obsession, répétée à longueur de tribunes, est de spolier les fameux ultra-riches et d’affirmer crânement que reculer l’âge du départ en retraite, c’est « voler des années de vie ». Comme si gagner de l’argent était un péché dont on doit être puni, comme si le travail était un enfer, et que la « vraie vie » commencerait une fois en retraite. Cette même gauche qui promet d’augmenter le Smic et tous les aides aux ménages, d’abaisser l’âge de départ à la retraite, sans créer davantage de richesses, laissant croire que « taxer les ultra-riches » et les entreprises permettra de trouver plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Le plus drôle est que cela vient des écologistes, qui assez systématiquement, font des choix politiques radicaux qui pénalisent systématiquement l’industrie et prônent plus ou moins ouvertement la décroissance. L’industrie pollue, et devrait donc disparaitre de notre pays, mais pas question d’accepter qu’elles procèdent à des plans sociaux. Il faudra m’expliquer cette contradiction. On peut très bien vouloir un pays sans pollution, sans risque de cancer, mais dans ce cas, on assume que c’est aussi un pays sans activité économique, où les aides publiques (la fameuse allocation universelle) sont les seuls revenus. C’est juste intenable.

Il y a une forme de haine de l’entreprise de la part d’une grande partie de la gauche, et voilà qu’une fois que leurs efforts portent leurs fruits, ils s’en vont chercher des responsables ailleurs que dans leurs rangs. Ce serait la faute des pouvoirs publics (sous-entendu du gouvernement macroniste). Mais eux, bien évidemment, sont des gentils, qui après avoir poussé des entreprises étrangères à partir ou à réduire la voilure en France, viennent pleurer au chevet des chômeurs qu’ils ont contribué à créer.

Un tel degré de mauvaise foi est la preuve d’une irresponsabilité qui devrait les faire écarter à tout prix de l’exercice du pouvoir.

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Le tournant géostratégique de 2025

L’arrivée au pouvoir de Donald Trump est un tournant pour l’Europe. Les attitudes et les discours (comme celui de J.D. Vance à Munich) sont sans équivoque. Un tournant majeur a eu lieu à Washington, qui va nous impacter très fortement et nous obliger à réagir.

Les dirigeants des États-Unis ont un profond mépris pour les démocraties libérales, et mettront tout en œuvre pour les faire basculer vers des régimes illibéraux, comme celui qu’ils mettent en place. Leur soutien à l’Afd en Allemagne, à Meloni en Italie ou à Orban, est explicite, et diplomatiquement peu correct. On est aux frontières de l’ingérence, et c’est parfaitement assumé. Derrière les questions géopolitiques, il y a une forme de croisade idéologique contre une forme politique née en Europe de l’Ouest, la démocratie libérale.

Le tournant est aussi celui de la brutalité. Trump et sa bande n’en n’ont rien à faire de la politesse, de la civilité et du respect des formes. Ce sont des brutes épaisses, qui ne comprennent que le rapport de force, et n’hésitent pas devant les intimidations. Tordre le bras d’un allié en l’humiliant au passage ne leur fait pas peur. Ce faisant, ils sont en train de détruire l’ordre mondial, qui repose sur le compromis et une recherche de l’apaisement des tensions. Sur la scène internationale, Trump est un collégien qui se comporte en caïd dans une cour de récréation de primaire.

Les européens savent déjà à quelle sauce Trump veut les manger. Pour leur défense, les européens ne pourront compter que sur eux, hors de question pour les États-Unis de continuer à garantir seuls la sécurité militaire du continent européen. Les européens sont donc priés d’augmenter très sensiblement leurs budgets militaires, tout en s’approvisionnant auprès du complexe militaro-industriel américain. Trump espère bien gagner sur les deux tableaux. Et en prime, il espère que les européens viennent lui baiser la babouche, en s’alignant sur ses positions idéologiques (« liberté d’expression, « wokisme »…)

Face à la Russie, il n’y aura pas de cadeau non plus. Les négociations ont commencé, facilités par une forme de proximité entre Trump et Poutine sur leurs conceptions de l’exercice du pouvoir et de la géopolitique. Trump ne fera pas de cadeau à Poutine, mais si les concessions se feront sur le dos des européens, cela ne l’empêchera absolument pas de dormir. A moins que les Européens viennent le supplier de ne pas le faire, et se couchent devant ses exigences. Un accord va probablement avoir lieu, où les USA peuvent lâcher l’Ukraine, voire même donner des marges à Poutine pour menacer l’Europe, en échange d’accords économiques où la Russie devra s’approvisionner aux États-Unis, et prendra ses distances avec la Chine (principal ennemi pour Trump).

Au niveau mondial, les États-Unis ont déjà commencé leur œuvre de déstabilisation, en quittant un certain nombre d’organisations multilatérales, en lançant des guerres commerciales et en coupant net l’aide internationale. Cela risque de fragiliser grandement un certain nombre de pays pauvres, et donc accroitre l’instabilité et donc le désordre mondial, avec un accroissement des migrations et une désorganisation du commerce mondial (pénuries de matières premières, difficultés logistiques).

Face à tout cela, l’Europe doit s’organiser pour tenter de faire front. Cela va demander d’importantes réorientations, dont nous n’avons pas les moyens. Financièrement, nous croulons sous les déficits et les dettes, et le seul moteur, l’économie allemande, est en panne. Politiquement, nous n’allons pas mieux. Le gouvernement est impuissant en France, va bientôt l’être en Allemagne, l’Italie est déjà chez Trump, et la légitimité de la Commission européenne (particulièrement de sa présidente) est faible.

La seule véritable capacité d’agir pour éviter cela est aux États-Unis. Mais il y a beaucoup d’inconnues. Quelle va être la capacité des opposants politiques de Trump à l’empêcher d’agir ? Quel poids du monde des affaires sur la politique de Trump ? Quelle solidité des contrepoids au sein des institutions, quand le Congrès et la Cour Suprême sont aux mains des Républicains et que Musk est en train de démanteler l’administration ?

L’année 2025 sera sans doute celle d’un tournant majeur, et nous y sommes bien mal préparés. Le risque est grand que nous ne soyons plus qu’un vassal, une colonie américaine, qui nous traite comme nous avons traité nos colonies africaines.

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Des élus démissionnaires de leurs responsabilités

La classe politique est devenue complètement hors sol, et ne semble ne plus avoir que la communication et les « signaux politiques » comme horizons, alors même la société est de plus en plus polarisée et brutale. En revanche, l’exercice concret du pouvoir ne semble plus du tout les intéresser.

Bruno Retailleau vient d’en donner un exemple éclatant (parmi de très nombreux) en se prenant un retour de bâton en pleine gueule, lors d’une matinale sur une radio.

Alors qu’il se plaignait d’un jugement de tribunal administratif qui a annulé un arrêté d’obligation de quitter le territoire (la fameuse OQTF, devenu un symbole politique) contre un étranger, un magistrat du Tribunal administratif qui a prononcé l’annulation, lui a répondu. C’est à voir ici, et c’est d’une cruauté absolument jubilatoire.

En résumé, le magistrat lui rappelle que le tribunal n’a fait qu’appliquer strictement une loi de 2024, qui avait été votée par le groupe LR du Sénat, alors présidé par un certain… Bruno Retailleau. Il ajoute que cette attaque politique, totalement injuste, a généré de fortes tensions, avec des insultes et des menaces de mort à l’encontre des magistrats ayant prononcé la décision.

Dans une société aussi tendue, le rôle des politiques, et tout particulièrement des membres du gouvernement, devrait être d’apaiser les tensions, de produire des décisions publiques cohérentes, et d’assumer leurs responsabilités de chefs de la machine administrative.

Rien de tout cela chez Bruno Retailleau, qui se croit encore dans l’opposition, et ne cherche qu’à jouer le coup d’après, au service exclusif de sa carrière personnelle. Malheureusement, c’est en train de devenir la majorité de l’espèce « homo politicus » en France aujourd’hui, avec une démission des élus de leurs responsabilités.

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Le conseil constitutionnel poursuit sa politisation

Si on en croit la presse, le choix des trois personnalités qui devront être nommées prochainement au conseil constitutionnel est fait. Et ce seront trois personnalités politiques, anciens parlementaires. C’est la poursuite d’une évolution pour l’institution, qui mérite qu’on s’y arrête.

Le Conseil est conçu, dès le départ, comme un régulateur politique, chargé du contentieux électoral, et d’un contrôle destiné à protéger le gouvernement, notamment face au Parlement. Si l’institution s’est progressivement émancipée, elle a gardé ses fonctions d’origine dans son ADN. Depuis 2010, et la mise en place de la QPC, l’activité s’est beaucoup enrichie, et s’est rapprochée du travail réalisé par les différentes cours constitutionnelles. Au point que, dans sa communication, Laurent Fabius insistait beaucoup là dessus. Le débat sur cette évolution est d’ores et déjà tranché, sans avoir vraiment eu lieu.

En effet, la vague de nominations qui arrive règle la question, avec à l’issue pas moins de 7 anciens parlementaires sur 9 membres. Les deux non politiques sont des magistrats. Autant dire qu’on est très loin des normes admises pour la composition d’une cour constitutionnelle, qui demande une grande majorité de juristes. Des vrais juristes, qui ont exercé en juridiction, pas des politiques qui ont fait des études de droit, il y a longtemps, et ont juste siégé dans une commission des Lois. Le regard sur les dossiers sera donc nécessairement politique. Ce n’est pas à l’âge où on entre au conseil constitutionnel qu’on change de point de vue. Pour ce qui est de la compétence, je ne me prononce pas, mais le doute est permis, au moins pour certains.

Cette vague pourrait aussi fragiliser l’autorité morale du conseil, qui est pourtant un atout majeur, quand on est un régulateur. Avec le départ de Laurent Fabius, il n’y aura plus aucun représentant de la gauche et les anciens élus du bloc central auront une large majorité. Un magnifique angle d’attaque pour tenter de discréditer les décisions, en mode « complotiste », en instillant le doute, sans le moindre élément concret. Et cela fonctionnera, malheureusement. En plus, la nomination de Richard Ferrand, considéré comme un très proche du chef de l’Etat, ne manquera pas d’être assimilée à du copinage, donc illégitime. Même si c’est la norme pour la nomination du président de l’institution (on pense à Debré ou Fabius), il n’est pas certain que ce qui passait il y a 15 ans, soit toujours acceptable aujourd’hui, dans un contexte politique beaucoup plus difficile.

Encore un indice d’une mauvaise santé de nos institutions démocratiques.

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Macron touche le fond

Le président de la République vient de faire les annonces concernant la rénovation d’un grand musée parisien. Cela me laisse pantois, tant cela ne relève absolument pas du niveau du chef de l’Etat. Politiquement, cet épisode est désastreux, sur plusieurs plans.

Ce n’est pas du niveau du président, car c’est assez insignifiant qu’on change l’entrée du public, le plan de circulation et qu’on déplace la Joconde. Et surtout, cela relève de la gestion courante, et donc du gouvernement. C’est à la directrice du musée, voire, au grand maximum, à la ministre de la Culture, de faire ces annonces, mais certainement pas au président de la République. Il n’a pas autorité ni compétence pour le faire, et continue à croire qu’il est toujours le grand chef, comme avant la dissolution.

Elle démontre un parisianisme du président, qui vole au secours d’un établissement public déjà très bien doté. Même si c’est une locomotive de l’industrie touristique parisienne, avec une forte visibilité à l’international, cela montre qu’il y a une attention différenciée entre Paris et la Province, au profit de la capitale, bien évidemment. J’attends maintenant les appels d’établissements culturels de province, qui sont légitimes, eux aussi, à demander que le président se déplace pour annoncer le ravalement de leur façade.

C’est également désastreux, à l’heure où le gouvernement coupe largement dans les budgets, notamment culturels, de montrer qu’il y a encore des privilégiés, qui ont l’oreille du président, et peuvent donc espérer sauver leurs crédits. Les premiers chiffres donnent autour de 700 millions d’euros sur 10 ans. Comment justifier des travaux qui s’annoncent importants, dans un établissement déjà riche, quand d’autres risquent tout simplement de mettre la clé sous la porte ?Même si Emmanuel Macron explique qu’une grande partie des travaux se fera sur fonds propres et par le mécénat, personne n’est dupe. Le Louvre nécessite de gros travaux, et pas juste un réaménagement avec un coup de pinceau. Les recettes avancées sont aléatoires, et en cas d’insuffisance, cela se fera sur fonds publics.

Le contexte est tout aussi désastreux. Cette visite présidentielle surfe sur l’émoi médiatique, provoqué par la révélation, il y a quelques jours, d’une note de la directrice du Louvre, qui alerte sa ministre de tutelle du délabrement du musée. Si Emmanuel Macron a été capable d’annoncer des éléments précis, à peine 15 jours après, c’est que tout était déjà dans les cartons. Bref, qu’il prend les gens pour des cons.

Cela montre à quel point Emmanuel Macron est au fond du trou, politiquement et médiatiquement. Cette visite est la révélation qu’il ne sert en fait plus à rien, et c’est cela le plus désastreux. Le Roi est nu et ça se voit.

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Sur l’IA, l’innovation va plus vite que tout

Lundi 27 janvier, les bourses ont connu une journée agitée, avec des baisses assez spectaculaires, sur des valeurs boursières liées à l’intelligence artificielle. Une entreprise chinoise est en effet parvenue à développer une IA, tout aussi efficace que celles des vedettes américaines du secteur, mais pour 10 fois moins cher, et une consommation énergétique moindre.

La bulle spéculative de l’IA en a pris un coup, mais par là où on aurait pu le penser. Il n’y a pas eu de gap technologique, d’avancée spectaculaire. Juste la preuve que certaines entreprises (américaines notamment) sont bien meilleures en marketing qu’en éco-conception, et ont cramé des centaines de millions en pure perte.

Tout cela montre qu’on se précipite un peu trop sur ce sujet de l’IA, en surréagissant à la moindre bricole, avec beaucoup de trop de brassage d’air, y compris sur le plan politique. Je ne parle même pas du médiatique, où ça tourne au délire, et brouille la compréhension. J’ai décroché depuis un certain temps, devant le fouillis complet « d’expertise » et de débats qui deviennent insignifiants, si ce n’est obsolètes. Il y a beaucoup de trop de bullshit, dans les tribunes, évènements et publications sur l’IA.

Les enjeux sont pourtant assez simples. On a une innovation technique (mais pas nécessairement une rupture fondamentale), qui permet de réaliser un saut qualitatif dans le traitement de la donnée. L’enjeu est important, cela permet plein de choses très intéressante, mais c’est du même niveau que l’arrivée de l’ordinateur personnel, ou encore d’internet. Mais au lieu de se faire sur une dizaine d’années, cela se déroule en trois fois moins de temps, ce qui donne un sentiment d’urgence, et pousse à se précipiter pour faire et surtout, dire n’importe quoi. D’où un brouillard épais dans la réflexion autour du phénomène, car analyser demande un peu de temps et de recul.

Cela explique le coté erratique, tant sur le plan boursier que celui de la régulation. La France s’apprête à accueillir, début février, un sommet mondial sur le sujet. On se demande ce qui peut bien en sortir d’intéressant, tellement l’innovation avance plus vite que la réflexion. Sur tous les sujets discutés, que ce soit le « partage de la valeur » (les tentatives de racket des ayant-droits), les questions de consommation énergétique, l’éthique et le respect des interdits, les documents longuement préparés sont obsolètes avant même d’être signés.

On a pourtant l’expérience de cela, avec l’Europe qui décide de réguler (avant de savoir ce que c’est réellement) et qui lance des travaux législatifs, qui sont percutés de plein fouet par ChatGPT et l’IA générative. Il n’empêche, on continue.

Le débat public gagnerait à se poser, à reprendre son souffle, et à écouter davantage les scientifiques. Cela permettrait de partir sur la base de possibilités, et non plus sur des certitudes, concernant les évolutions, et donc les régulations et efforts nécessaires pour accompagner ce développement.

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Wikipédia est-il de gauche ?

Un récent article du Figaro évoque la question de l »orientation politique de Wikipédia, qualifiant l’encyclopédie en ligne de « woke ». Rien de surprenant, cette vision étant attendue, voire recherchée par le lectorat du Figaro, le journaliste ne fait que donner à son public, ce qu’il a envie de lire et conforte ses opinions.

Mais sur le fond, est-ce vrai ? La réponse ne peut être que nuancée, et donc inaudible pour des journalistes et des lecteurs qui veulent des certitudes et des positions arrêtées et binaires.

Oui, Il existe un biais « de gauche » à Wikipédia, par son objet même, la libre diffusion du savoir, et ses modalités, la libre réutilisation sous licence libre. La création et l’entretien d’un commun, c’est davantage dans le logiciel idéologique de la gauche, moins dans celui de la droite. Cela fait déjà un premier tri, à un niveau qui relève de l’engagement idéologique et philosophique, sans que ça soit, pour autant, un engagement partisan.

La communauté des contributeurs de Wikipédia est très typée. En résumé (un peu caricatural), c’est « homme blanc, jeune, urbain, diplômé » qui se rapproche assez du lectorat type de Libé. Si vous êtes une femme des classes populaires, issue d’une minorité ethnique, vous êtes un OVNI dans ce monde. Inutile de vous dire que les engagements partisans ces couches surreprésentées dans la communauté vont plutôt vers la gauche, voire l’extrême-gauche.

Mais…

Une grande partie de cette communauté est loin, voire très loin, d’être politisée. Dans le profil type « homme blanc diplômé », il faut ajouter aussi « informaticien » car il y a quand même un coût d’entrée dans la communauté « centrale », celle qui pèse sur les décisions. Même si la contribution a été grandement facilitée par des outils comme l’éditeur visuel, dès que vous entrez dans le dur, et donc la maintenance, il faut savoir coder un minimum, connaitre des procédures et des codes internes. Ce n’est pas à la portée de tout le monde. Or, cette branche de la communauté est moins sensibilisée à des problématiques partisanes. Même s’ils ont leurs opinions politiques, une grande majorité des contributeurs n’en fait pas l’alpha et l’omega de son engagement contributif sur Wikipédia. Pour beaucoup, c’est même assez marginal, et l’engagement en faveur du projet et de ses buts est bien plus important que militer en faveur de telle ou telle autre idéologie. Vous pouvez donc parfaitement vous penser de gauche, et considérer que les revendications « woke » n’ont strictement rien à faire sur Wikipédia, parce que contraires aux principes fondateurs.

En résumé, il y a sans doute plus de gens de gauche que de droite dans la communauté wikipédienne, mais cela n’a pas un effet si important que ça sur le contenu et les biais, car il existe plusieurs mécanismes stabilisateurs.

Les décisions les plus importantes sont prises dans la discussion, avec de nombreux débats. Ce que le journaliste du Figaro présente comme des « batailles » ou des « guerres » internes, ne sont en fait que des discussions, plus ou moins vigoureuses, qui sont le mode de fonctionnement normal de la communauté wikipédienne. Ces discussions ont très souvent tendance à aboutir à des compromis « centristes » où les contributeurs idéologiquement très marqués ont beaucoup de mal à imposer leurs vues.

L’exemple le plus frappant est celui de l’écriture inclusive. Si la communauté wikipédienne était si woke que ça, son utilisation y serait systématique, et ne ferait pas débat. Or, un sondage de 2022, dont les résultats sont toujours valides, a montré qu’une majorité (60-70%) y est hostile, avec une acceptation plus grande pour ce qui est passé dans l’usage courant (féminisation des fonctions) et une hostilité marquée pour le point médian et les pronoms façon « iel ». Ce n’est pas faute aux partisans de cette écriture inclusive d’avoir fait le forcing. Sur d’autres sujets, comme les conventions sur les rédactions des articles des personnes trans, ce groupe militant, abusivement classé sous la bannière de l’association « les sans pagEs », a également beaucoup de mal à imposer ses vues, provoquant des débats tendus, voire violents.

La contribution et la communauté sont encadrées par un corpus de règles, de recommandations et de pratiques qui limitent les effets de l’entrisme militant. L’une de ces règles est le respect d’un minimum de savoir-vivre, et l’obligation de se plier à des discussions parfois longues. Si certains militants (pov-pushers dans le jargon wikipédien) savent utiliser et jouer avec les règles, une grande majorité, qui est dans le passionnel, perd vite patience. Les insultes et les tentatives de passage en force arrivent assez rapidement, et permettent de les sortir, non pas pour des désaccords de fond, mais pour des raisons de forme. C’est assez efficace pour faire le ménage.

Il faut aussi voir que la wikipédia en français compte 2 660 000 articles, dont l’écrasante majorité ne pose aucun problème de biais militant. C’est tout au plus 10 à 20 000 articles, essentiellement sur des biographies de personnes vivantes et sur les sujets sociétaux, qui concentrent les tensions. C’est une goutte d’eau. Ces articles « tendus » portent sur des sujets qui font eux-même l’objet de vives tensions dans le débat public en général. Et contrairement à ce que laissent penser cet article du Figaro, les principaux points de tensions ne sont pas le sociétal, mais le géopolitique. Les articles autour du conflit israélo-palestinien, les régimes autoritaires (Azerbaïdjan, Qatar…) ou encore les rivalités entre marocains, algériens et tunisiens sont bien plus problématiques.

Les grands enjeux pour wikipédia sont tout autres que ces querelles « woke ou pas woke ». Les préoccupations portent plutôt sur les questions de fiabilité de l’information, avec les multiples campagnes de désinformation, ou encore l’utilisation de l’IA, qui ciblent Wikipédia, mais aussi et surtout les sources utilisées pour écrire des articles sur Wikipédia. En effet, la règle de base est que Wikipédia ne peut être qu’une synthèse du savoir existant, et n’est en aucun cas un lieu de production de savoir inédit. Donc si les sources utilisées sont « corrompues », cela se retrouvera nécessairement sur Wikipédia.

Plutôt que d’aller regarder sous le capot de Wikipédia, pour savoir si c’est de gauche ou pas, les journalistes feraient mieux de se préoccuper de la fiabilité des informations qu’ils publient et de leurs propres biais !

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Bluesky vaut-il mieux que X ?

A l’approche du 20 janvier, nombre de personnes qui se pensent dans le camp du bien, annoncent avec fracas vouloir quitter X, pour se replier ailleurs, en général Bluesky ou Mastodon. Cette posture m’amuse, car si on voulait vraiment quitter X (ou s’en passer), on pouvait le faire bien avant, sans tambour ni trompette. Mais c’est vrai que prendre la posture, c’est tellement plus cool. J’ai toujours détesté les postures.

Personnellement, j’ai quitté Twitter il y a plusieurs années. Ejecté par une modération un peu erratique ayant suspendu mon compte pour une raison que je n’ai toujours pas saisi, j’ai refusé de fournir mon numéro de téléphone, et je n’ai pas pu le réactiver. Je m’en suis donc passé, et cela ne m’a pas manqué tant que cela. Je me suis inscrit sur Mastodon et Bluesky assez rapidement après leur création. Je suis largement inactif sur le premier, et un peu présent sur le deuxième, sans y être hyperactif.

Cette expérience de diète de réseaux sociaux m’a amené à relativiser grandement l’intérêt et l’utilité de ces réseaux sociaux. Passé les débuts, où c’était quasiment un club privé, de technophile parisien, c’est devenu un canal de communication, où le but n’est pas de converser et d’écouter, mais de placer sa marchandise. Aujourd’hui, X ne présente plus d’intérêt, on n’y apprend plus rien, ça n’est plus que des postures, de l’auto-promo et des militants qui balancent leurs émotions, en général négatives. Vu comment les choses évoluent sur Bluesky, ça me semble très bien parti pour être la même chose.

J’ai par exemple été assez atterré par l’utilisation des listes de blocage, où certains sont quasiment titrées « liste des cons qui ne pensent pas comme moi » et destinées à « faciliter » la purge idéologique. Des listes de proscription, où certains se demandent bien ce qu’ils ont pu dire ou écrire pour s’y retrouver. En clair, on bloque les gens qui ne pensent pas comme vous, qui ont dit un truc qui vous choque, pour ne pas avoir à les lire, et rester entre soi, dans une jolie bulle de filtre. Cela ne protègera pas pour autant des imbécilités militantes qu’on trouvait sur X, et qui vont se transporter sur Bluesky.

Si on veut discuter réellement, échanger, développer une pensée, ce n’est pas plus que Bluesky que sur X que cela pourra se faire. En fait, ça ne changera pas grand chose, sinon qu’on aura eu la satisfaction narcissique d’être dans le camp du bien en ayant quitté X et Elon Musk.

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Pathétiques négociations

La classe politique française nous offre à nouveau un spectacle lamentable, avec ce feuilleton des négociations entre Bayrou et le PS. Le gouvernement ayant besoin, au minimum d’un accord de non-censure, se doit de discuter avec le PS. Ce dernier, qui risque de porter la responsabilité de l’instabilité en cas de censure et d’absence de budget, fait également semblant de discuter.

Le niveau est pathétique. Le PS continue à s’arcbouter sur la réforme des retraites de 2023, demandant au gouvernement de la « suspendre » alors qu’elle est déjà entrée en vigueur depuis près de deux ans. Il présente ça comme une concession, puisqu’il ne demande plus l’abrogation. En gros, le PS demande juste une victoire symbolique, un scalp qu’il puisse brandir devant les militants.

Car en pratique, je vois mal comment on peut « suspendre » l’application des règles de calcul des droits à la retraite des Français. Comment, concrètement, on fait pour ne plus tenir compte, pendant quelques mois, du relèvement de l’âge de départ à 64 ans ? Je ne sais pas, et je cherche encore l’expert qui pourra me le dire.

Il y aurait pourtant une solution, qui consisterait à discuter, dès maintenant, du contenu d’une nouvelle réforme. Si le PS était capable d’arriver avec une proposition de réforme, clé en mains, les discussions prendraient une autre tournure. Partir sur le principe d’une « abrogation » d’une réforme déjà entrée en vigueur est absurde, car techniquement très compliqué à mettre en œuvre. Cela implique de revenir sur des droits acquis, à tout recalculer. Un enfer. Mieux vaut partir de l’existant, et proposer, pour l’avenir, des règles un peu différentes, qui permettent d’aboutir à un résultat politique « positif », et pas « négatif », comme c’est le cas en ce moment.

Il semble, malheureusement, que le PS soit totalement incapable de proposer quoi que ce soit. Quelle réforme veulent-ils ? Quels buts politiques ? Quelles modalités techniques proposent-ils ? Quel financement ? On n’a aucune information, et en face, le gouvernement Bayrou n’est pas capable (ou n’a pas envie) de mettre sur la table une proposition de réforme, afin d’engager la discussion sur le fond, au lieu de rester dans le symbolique. On va donc droit vers l’échec, car un accord de gouvernement ne peut pas se faire sur la base de symboles, mais d’un accord « positif » sur des réformes à engager.

On se rend compte à cette occasion, et c’est dramatique, que nos élus se fichent de plus en plus de l’effectivité de leurs propositions, et passent leur temps à manier les symboles. Le camp gouvernemental n’est pas exempt, avec par exemple cette sortie de Bruno Retailleau sur les accompagnantes de sorties scolaires qui ne devraient pas être voilées. Il est hors de son champ de compétence ministériel, sur un sujet qui ne pose aucun problème technique. Et si sa demande aboutit, elle risque de désorganiser un service public, car ces mères de famille sont indispensables pour l’organisation des sorties scolaires, en assurant bénévolement le respect du ratio d’encadrement prescrit par les lois et règlements. Les écoles n’auraient pas les moyens de payer des accompagnants, et cela se traduirait, dans bien des endroits, par la suppression pure et simples des sorties scolaires.

Je dois avouer que j’en ai plus que marre de cette classe politique, incapable de travailler sur le fond, et qui passe son temps à se précipiter sur des chiffons rouges.