Le niveau baisse à l’Assemblée nationale, tous les observateurs le constatent, mais un point m’inquiète plus particulièrement, c’est la transformation du travail parlementaire en cirque médiatique. Que sur le fond, les députés ne pèsent pas lourd dans les décisions politiques, ça n’a rien de nouveau. Ce qui change, c’est qu’ils se donnent en spectacle d’une manière tellement lamentable, que l’image de l’institution, des Institutions, je dirais même, s’en trouve atteinte.
Normalement, la médiatisation sert à faire connaitre le travail parlementaire d’un député, à mettre en valeur son action et ses convictions. De plus en plus, j’ai l »impression que c’est l’inverse qui est en train de se passer, c’est le travail parlementaire qui doit se plier et se formater, en fonction de la communication que le parlementaire entend faire de sa personne.
Cela se remarque à plein de petits détails. Il y a d’abord ce nombre extravagant d’amendements sur tous les textes, dont la plupart sont juridiquement inutiles et inopérants. Énormément de bavardages, sur des sujets parfois anecdotiques. C’est par exemple la proposition de loi visant à interdire la Fast-Fashion, sujet hautement « sexy » médiatiquement, mais très ciblé et anecdotique. Sur ce dossier, deux députés (une horizons et un LR) qui se déchirent sur la paternité de l’initiative, celui a finalement perdu (le LR) floodant d’amendements la PPL Horizons, pour bien montrer qu’il veut sa part de lumière. Ce texte, de trois articles, a généré 200 amendements en commission et autant en séance. Tout cela pour un résultat incertain, car interdire ou entraver une activité économique qui se déroule en ligne, c’est comme vouloir empêcher l’eau de couler. Surtout quand on se place sur un niveau purement franco-français. La même semaine, les députés ont réussit à pondre 61 amendements en séance, sur une proposition de loi relative à la professionnalisation de l’enseignement de la danse. Et la semaine prochaine, on va parler de discrimination capillaire. Que des grands enjeux engageant l’avenir de la Nation (en fait non).
Le deuxième aspect est l’instrumentalisation des outils du contrôle parlementaire de l’action gouvernementale, régulièrement détournés de leur but. Normalement, une commission d’enquête est faite pour explorer une politique publique, ou une action du gouvernement qui prête le flanc à la critique. Les députés LFI et RN semblent complètement se moquer de cela, et souhaitent surtout organiser des procès politiques, contre le gouvernement (là encore, ça peut passer) ou contre leurs adversaires idéologiques. Cela permet d’organiser des auditions publiques, sous serment, dans le but de faire trébucher l’adversaire, avec des questions perfides, ou de provoquer des éclats, qui feront le buzz sur les réseaux sociaux. A se demander si ce n’est pas devenu cela le but premier.
L’an dernier, LFI a utilisé son droit de tirage sur les « Uber Files », avec une volonté très claire d’essayer de mettre en cause Emmanuel Macron, par le biais des liens et interactions qu’il a eu avec l’entreprise Uber. La matière était fournie par une fuite massive de données, donc même pas besoin de mener une enquête sérieuse. Cette année, ils ont fait encore plus fort, avec une commission d’enquête sur la manière dont le régulateur de l’audiovisuel exerce ses pouvoirs de sanction contre les dérapages des chaines de télévision. Dans les faits, il n’y a qu’une chaine, CNews, et un peu Cyril Hanouna (qui en a profité pour se foutre de leur gueule), qui intéressent le rapporteur LFI. Une belle occasion de taper sur Bolloré, l’ennemi idéologique, au point que parfois, on se demande si on est sur une enquête relative au fonctionnement des pouvoirs publics, ou sur un procès politique à grand spectacle.
Enfin, on a vraiment l’impression que les réseaux sociaux sont le débouché principal de tout. Cela génère des pastilles vidéos et des images marketing bien léchée pour annoncer « je vais poser un question au gouvernement », « j’ai été nommé à tel poste sans la moindre importance », que l’on poste sur Instagram ou Twitter. On a en vu même qui annoncent leur présence dans une audition de commission d’enquête, où ils ne peuvent finalement pas prendre la parole. Ils se défoulent ensuite, en débriefing « façon téléréalité », dans leur bureau, avant de mettre en scène leur déport en raison d’un conflit d’intérêt pour l’audition suivante. Il ne s’est rien passé concrètement, mais ça a fait du buzz. On se croirait au cirque !
Je ne parle même pas de l’inculture juridique (voire de l’inculture tout court) d’un nombre croissant d’élus, qui ne bossent pas et n’existent que par les excès verbaux et les coups d’éclat. Il y en a toujours eu, mais là, il y en a de plus en plus, au point qu’on pourrait craindre, à la prochaine législature, qu’ils ne soient majoritaires !
En même temps, il ne faut pas être surpris que la dégradation régulière de la qualité de la vie politique finisse pas par se retrouver aussi à l’Assemblée. Le problème est général, c’est la politique qui est malade, la déchéance de l’Assemblée nationale n’en est qu’un symptôme.
5 réponses sur « L’Assemblée ressemble à un cirque médiatique »
Amusant, tant qu’ils étaient plus ou moins sérieux, dignes, travailleurs, et érudits, les députés faisaient illusion sur leur véritable utilité, désormais issu des rangs LFI ou FN, incultes, sans respect pour la fonction qu’ils occupent et bien peu travailleurs ils abaissent le niveau.
Au fond il faudrait peut-être non plus élire les députés, mais les choisir après casting pour savoir s’ils seront assez dignes, cultivés ou intelligents pour tenir un rang et voter des lois idiotes et mal fichues que le gouvernement propose ?
Que ce soit au Sénat ou à l’Assemblée Nationale on s’aperçoit que le médiocre a toujours été là, assis en tapinois et bien au chaud, qu’il n’attendait qu’un gouvernement crasse pour laisser libre à ses pires penchants : paresse, orgueil, luxure.
Blague à part, le spectacle est affligeant, les députés LFI n’ont visiblement pas travaillés ou mal choisi leur sujet.
Il y a toujours eu des médiocres, mais autrefois, ils ne la ramenaient pas, et si ces médiocres d’autrefois revenaient, ils seraient dans le milieu du panier d’aujourd’hui.
Est-ce seulement la médiocrité des parlementaires, ou est-ce surtout l’extrême faiblesse des partis et des groupes, qui ne sont plus là pour tenir les députés et leur imposer de faire des interventions vaguement pertinentes, et pas juste du buzz de très très bas étage?
Mais qui donc a choisi ces gens ? Au citoyen aussi de faire son métier (dédicace C. Nicolet) !
Pour paraphraser le citoyen de base: C’est la faute à Macron ! 🙂