Ces derniers jours, les appels au boycott ou au démantèlement des GAFA se succèdent venant d’élus et de responsables politiques. Quand ce n’est pas Google, c’est Amazon qui s’en prend plein la figure. A chaque fois, on est dans la posture, où on démolit, sans rien proposer en remplacement.
Ce comportement est malheureusement typique de la politique à la Française, où on adore créer des boucs-émissaires, pour les bruler en place publique. Cela permet de se pousser du col, au jeu du « plus radical que moi, tu meures » en se donnant bonne conscience. Diaboliser et dénoncer, c’est agir. Donc pas besoin d’en faire plus. C’est pitoyable et pathétique !
Faire de la politique, c’est d’abord identifier les problèmes, dire en quoi cela pose problème, puis élaborer des solutions applicables, où un maximum d’acteurs s’en sortent gagnants.
Sur le sujet Amazon, le principal problème est que le basculement des consommateurs vers le e-commerce, qui s’est accéléré avec la crise sanitaire, menace les commerçants « physiques » qui ne sont plus en mesure de rivaliser. Premier point, le e-commerce ne se limite pas à Amazon, loin de là, et ses parts de marché en France ne sont pas si élevées. Concentrer le tir sur cette entreprise, et l’ériger en symbole (la bête à abattre) c’est prendre le risque de nuire aux autres entreprises du e-commerce, voire aux consommateurs, et laisser Amazon quasi indemne. Taxer le e-commerce, c’est au final pénaliser les consommateurs, sur qui le montant de la taxe va être répercuté. Démanteler les plateformes américaines, c’est juste ouvrir la voie aux chinois, l’Europe n’ayant rien à proposer comme alternative aux consommateurs.
Ces postures extrêmes sont vouées à l’échec, d’abord parce que ces grands acteurs mondiaux sont largement à l’abri du gouvernement français. Google ne doit pas vraiment trembler devant les diatribes du président de la région Hauts-de-France, qui devrait peut-être davantage s’occuper des risques de fermetures d’usines dans sa région, que de crier sus aux Gafa.
La solution n’est donc pas d’essayer de tirer le e-commerce vers le bas, mais de faire monter en compétence les commerçants « physiques », pour qu’ils soient capables de rivaliser et donc de survivre. Cela demande un énorme effort de formation, d’équipement en matériel informatique, de réorganisation de l’activité. C’est autrement moins glamour et valorisant que de manifester devant un chantier d’entrepôt, en criant des slogans (et de rentrer le soir, pour commander ses courses sur internet, ou aller dans la grande surface, parce qu’on n’a pas eu le temps de les faire dans le commerce de proximité).
Cela peut aussi passer par une surveillance un peu plus poussée des pratiques, parfois prédatrices, de grandes entreprises, avec une régulation pensée pour protéger les « petits » commerçants et les consommateurs. Mais là encore, cela demande du travail, pour comprendre les évolutions technologiques, enquêter, et savoir exactement où frapper. Ce n’est pas en bloquant l’installation des entrepôts d’Amazon qu’on va l’empêcher d’étouffer les petits commerçants sur sa market place.
Tout cela demande un travail de fond, où il faut avancer avec tous les acteurs, y compris les Gafa, qui sont peut-être un problème, mais aussi une partie de la solution. Cela donne des petites avancées, pas très spectaculaires, et peu valorisante dans un pays comme la France, où on ne rêve que de grands soirs et de tables rases.
Si la France est tombée aussi bas, c’est peut-être aussi parce que sa classe politique a majoritairement choisi de basculer dans la facilité et la démagogie. Cela peut être payant à court terme (et flatteur pour l’ego) mais c’est désastreux à long terme, car cela ne règle pas les problèmes de fond, qui pourrissent, et finissent par plomber complètement le pays.
2 réponses sur « L’irresponsabilité des élus français »
Ceci d’autant, en passant, que les market place proposées par Amazon et autres, avec leur support et garantie, permettent à des « petits commerçants » de trouver des débouchés en ligne auxquels ils ne pourraient pas prétendre dans le monde physique, faute de capacité marketing et distribution. C’est plutôt, comme tu le souligne, l’enjeu des commerces physiques et des externalités (positives ou négatives) en termes de lien social, mais aussi pollution, circulation, etc. qui est posé.
En même temps, cela ressemble aussi a une occasion de vrai réflexion sur la régulation des plateforme peut-être en réfléchissant au delà des frontières – https://www.yang2020.com/blog/regulating-technology-firms-in-the-21st-century/ – Il y a bien des rapport européens -https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2019/624262/EPRS_STU(2019)624262_EN.pdf – mais aucune voie politique sur le sujet.. au moins qui puisse s’entendre médiatiquement..