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Les Sages se prononcent sans se prononcer sur Marine Le Pen

La décision 2025-1129 QPC du conseil constitutionnel est un modèle de subtilité dans la rédaction. La question posée est ultra sensible, puisqu’elle porte sur l’exécution provisoire d’une décision d’inéligibilité contre un élu. Rendue trois jours avant la décision du tribunal Judiciaire de Paris, concernant Marine Le Pen, elle était attendue et le risque politique était énorme pour le conseil constitutionnel. Sa décision allait forcément être lue comme « favorable ou défavorable » à Marine Le Pen, qui risque une peine d’inéligibilité.

La première étape est de bien préciser la question, qui porte, non pas sur la possibilité de prononcer l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité, mais sur la procédure par laquelle le préfet, prenant acte de la décision du juge, prononce la démission d’office. C’est alors très facile de prononcer une décision de conformité à la constitution, le pouvoir exécutif étant tenu, constitutionnellement, de faire appliquer les décisions de justice. Ce faisant, le conseil constitutionnel a beau jeu de dire qu’il n’a rien dit sur le fait d’ordonner une exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité.

Mais pour autant, il insère une réserve d’interprétation qui porte sur l’exécution provisoire d’une décision d’inéligibilité. Il profite ainsi de l’occasion pour donner aux juges le mode d’emploi. Il commence par indiquer qu’il y a une limite à ce qu’ils peuvent faire en la matière, en posant une réserve de constitutionnalité. Il énonce ensuite, de manière un peu floue, les bases constitutionnelles d’une éventuelle censure :

« Sauf à méconnaître le droit d’éligibilité garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, il revient alors au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur. »

Le message est finalement assez clair. Le juge peut prononcer une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire, mais doit bien faire attention à rester dans une juste proportion entre la gravité du délit sanctionné, et l’impact sur la vie politique. Virer en cours de mandat un simple conseiller municipal, pas de souci. Virer un maire de grande ville (comme par exemple Hubert Falco à Toulon), c’est déjà plus impactant, mais si c’est pour des faits graves de corruption, ça reste dans la proportion. Plus on monte dans le mandat exercé, plus il faut de lourdes charges, pour priver immédiatement l’élu de son mandat.

Le coeur du message, non dit mais très suggéré, porte sur le cas de Marine Le Pen, pour l’instant juste députée et conseillère départementale. Les Sages suggèrent, en parlant de la « préservation de la liberté de l’électeur » qu’empêcher 30% des électeurs de pouvoir voter pour leur championne à la prochaine présidentielle, parce qu’elle a couvert un détournement de fonds publics pour financer son parti, ça peut être très délicat.

On est dans une logique préventive, où le Conseil constitutionnel préfère prévenir que guérir. C’est lui qui décide de la démission d’office d’un parlementaire, une inéligibilité avec exécution provisoire passera par lui, de même que l’enregistrement de l’éventuelle candidature à la présidentielle de Marine Le Pen. Il devra donc gérer la patate chaude (autrement plus brulante qu’aujourd’hui) et commence donc à poser les jalons d’une éventuelle future décision sur le cas Marine Le Pen, où il ne pourra pas se défausser.

Cette décision n’est certainement pas celle qu’aurait prise une « vraie » cour suprême. Mais le conseil constitutionnel n’a pas été pensé comme une cour suprême, mais comme un régulateur de la vie politique et institutionnelle. Et là, on comprend beaucoup mieux la logique à l’œuvre, qui est bien plus politique que juridique.

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L’onanisme social selon Choiseul

L’Institut Choiseul vient de publier son « classement » des 100 « jeunes dirigeants » (moins de 40 ans). Lancé dans le Figaro (qui est partenaire), il est suivi, pendant au moins une semaine, par les publications linkedin des intéressés, qui remercient l’Institut Choiseul pour les avoir « distingués » (avec des visuels assez semblables, probablement fournis l’institut Choiseul).

On y découvre donc la petite bulle parisienne, telle qu’elle se donne à voir, avec des clones, blancs pour la plupart, sortis des mêmes écoles, avec les mêmes parcours (avant et après). Les critères de sélections sont opaques, mais peu importe, l’entre-soi sait être souple, et au final, le « classement » donne le résultat attendu, celui de l’auto-promotion de la « jeune génération » des décideurs.

Tout ce cirque social me laisse de marbre, avec une pointe d’agacement, tant il est pathétique. Il symbolise jusqu’à la caricature, une forme d’arrogance des élites, qui est un des ingrédients de la fracture sociale. Tout ce beau monde se gargarise, en mode « personal branding » d’en être, alors que cela repose bien plus sur leur réseau (le fameux copinage) et sur leur visibilité médiatique que sur leurs qualités intrinsèques.

Combien de ces « dirigeants » sont de bons managers ? Combien ont déjà eu des résultats concrets et mesurables ? On n’en sait rien, et pour certains, qui ne sont finalement que des cadres de second rang (directeurs de cabinets, ou consultants), il n’y a sans doute rien à gratter car ils ne sont pas personnellement aux manettes. Finalement, pour ceux qui veulent savoir qui sont les « bons », ce n’est pas avec ce genre de classement qu’ils vont y trouver leur compte. Le souci, est que la mauvaise monnaie chassant la bonne, on ne trouve que cela dans les médias. Ils manquent ainsi à la « promesse » d’information, au profit du buzz en faveur des copains, qui renvoient l’ascenseur.

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Les limites du débat parlementaire

J’ai assisté hier soir au débat à l’Assemblée, sur l’article de la loi Narcotrafic qui cherchait à affaiblir le chiffrement des messageries. Même s’il s’est « bien terminé » (24 pour, 119 contre), ce débat m’a ramené 15 ans en arrière, lorsque les députés débattaient de la loi Hadopi. A entendre certains arguments, notamment ceux du ministre, j’avais envie de me cogner la tête contre les murs. Mis à part quelques spécialistes (trop rares), les autres ne pigeaient rien, mélangeant tout, dans un étalement d’ignorance technique. Je m’attendais presque à entendre un « anéfé », cri de guerre d’une Christine Albanel, qui nous avait parlé, pendant les débats de la loi Hadopi, du pare-feu d’open office…

De tels débats donnent une impression effroyable, qui dessert l’institution et la démocratie parlementaire dans son ensemble. Faut-il laisser des ignares prendre des décisions qui peuvent parfois être très lourdes de conséquences ? On peut se demander quel est la valeur de débats où les votes sont pris à l’issue d’échanges flous, avec des arguments faux, et 90% des participants qui, n’y comprenant rien, « font confiance » et votent sur des critères autres que la valeur des arguments. On a des débats aussi ineptes, qui ne sont que des parodies de délibération. Cela vaut pour tous les sujets, numériques ou autres.

Pourtant, il est difficile, voire problématique de se passer de débats publics, où à l’issue d’un échange où chacun expose ses positions, une décision est prise. C’est l’un des fondements de la démocratie libérale. Il est également difficile de demander aux membres d’une assemblée qui doit traiter de tous les sujets, d’être spécialistes de tout. Il faut donc revoir la manière d’organiser les débats.

La première étape est de mieux documenter les enjeux. Sur de nombreux points, très techniques, il est normal que les parlementaires aient besoin qu’on leur explique les choses. Actuellement, cela est fait par les lobbyistes, de manière complètement informelle, sans contradictoire ni vérification de ce qui est dit ou apporté aux parlementaires. C’est complètement insatisfaisant. Il serait indispensable de créer un espace ou chaque personne ayant des choses pertinentes à dire, puisse apporter sa contribution. Ce ne serait pas un vaste forum, mais au contraire, un espace sous contrôle, où un tri serait opéré, où des vérifications seraient faites, afin que le produit finalement livré aux parlementaires soit à la fois complet, synthétique et compréhensible pour les non spécialistes. Ce travail pourrait être mené par le rapporteur, qui plutôt que pondre un texte que personne ne lit, car il arrive bien trop tard, aurait ce rôle de défrichage technique. La transparence y gagnerait, car c’est un véritable débat préliminaire qui se mettrait en place. Mais cela implique d’arrêter de légiférer à la volée, et de se donner le temps.

La deuxième étape est de redescendre les choix techniques au niveau des commissions, réservant la séance aux explications (et postures) politiques. Il faut accepter que les députés doivent se spécialiser, et en tirer les conséquences, en donnant plus de poids dans la décision à ceux qui savent (à peu près) de quoi ils parlent, car ils ont bossé les sujets. Cela implique de revoir l’articulation entre commission et séance, qui font actuellement doublon. Le Parlement européen fait ça plutôt bien, cela n’a donc rien d’insurmontable.

Les assemblées parlementaires gagneraient beaucoup à sortir des faux-semblants et des mythes, qui consistent à dire qu’un député, même isolé, dispose de la plénitude du savoir et du pouvoir. C’est faux. Les assemblées sont des organes collégiaux. Le jour cela sera enfin admis et assimilé, on aura certainement un travail parlementaire plus efficace et plus épanouissant, pour les députés et pour qui suivent leurs débats.

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La politique du chien crevé au fil de l’eau

La France est condamnée à l’immobilisme, faute de majorité politique stable à l’Assemblée. C’est un constat assez général, publiquement formulé par Édouard Philippe, que je partage. Les trois blocs ont montré qu’ils ne sont pas capables de bâtir quoi que ce soit ensemble, sauf ponctuellement, par accident ou par nécessité absolue. Tant que de nouvelles élections législatives ne donneront pas une majorité cohérente et stable, il en sera ainsi. J’ai renoncé à espérer quoi que ce soit de l’actuelle législature.

Il en ressort naturellement que le gouvernement dispose de marges de manœuvre assez réduites. Il ne se passe pas grand chose d’intéressant au Parlement, où on enchaine les propositions de loi, dont beaucoup sont insignifiantes (une circulaire ministérielle suffirait pour atteindre l’objectif) ou confinés à un objet très circonstancié. Combien de textes, annoncés dans le programme de travail parlementaires, vont se retrouver au Journal Officiel ? Entre les rejets, l’enlisement, les retournements de vestes politiques, le Parlement risque surtout d’être un cimetière de textes, avec l’épée de Damoclès d’une dissolution, qui fait table rase. Aucune réforme d’ampleur n’est à attendre, et la gesticulation va dominer. Pour un gouvernement dépourvu de moyens financiers, si l’arme de la fabrication de loi lui échappe, il ne lui reste plus grand chose pour exister.

La survie politique dépendant de l’Assemblée nationale, le gouvernement ne peut prendre le moindre risque politique, sous peine d’être renversé. François Bayrou est donc condamné à l’immobilisme, et à suivre le courant des consensus politiques, en étant bloqué au moindre dissensus. On le voit bien, avec par exemple ce fameux « conclave » sur les retraites, qui tourne en eau de boudin. Exit une éventuelle réforme des retraites. Pareil pour la moindre réforme d’un mode de scrutin. La PPL sur la réforme du scrutin municipal à Paris, Lyon et Marseille n’ira pas loin et on ne parle même plus de la proportionnelle pour les législatives. Pareil pour la réforme de l’audiovisuel public ou encore le statut de la Corse. On arrive tout au plus à faire passer les transpositions de directives européennes, bref, on est dans la gestion des affaires courantes, guère plus.

Cela va sans doute durer comme cela jusqu’en octobre. La session extraordinaire se termine le 30 juin, et d’ici là, François Bayrou se gardera bien de donner le moindre prétexte pour déclencher une motion de censure (malgré ses gaffes à répétition). Il est aidé en cela par le fait que LR, les Verts et le PS sont en phase de renouvellement des chefs, donc occupés à leurs querelles internes. Pour la première fois depuis des décennies, il n’y aura pas de session extraordinaire cet été (ou alors quelques jours), car si les députés ne siègent pas, ils ne peuvent pas déposer et voter une motion de censure. François Bayrou est donc à peu près assurer de rester en poste jusqu’en octobre prochain. Pour ne rien faire ou presque, ce qui semble l’arranger, car son but était d’arriver au pouvoir et de s’y maintenir, pas forcément de l’exercer et d’en faire quelque chose. Il se montre d’ailleurs bien incapable d’impulser quoi que ce soit, comme si, depuis 15 ans, il n’avait pas travaillé, et s’était contenté de commenter la vie politique.

Puis va arriver octobre, et la nécessité de discuter et voter un budget. Le cirque de fin 2024 a montré qu’il n’est pas possible de passer outre un vote. Or, c’est le texte le plus délicat, car la situation financière sera encore plus catastrophique. Un vote positif implique une forme de reconnaissance de son appartenance à la majorité gouvernementale, je vois mal donc le PS rejoindre le « socle commun », seule solution pour éviter un rejet du budget. On va donc se retrouver à nouveau dans l’impasse, mais avec une nouvelle configuration : Emmanuel Macron aura retrouvé son pouvoir de dissoudre.

Cela va pimenter un peu le jeu politique, car il peut très bien décider, en cas de crise (motion de censure adoptée sur le budget) de nommer un autre premier ministre, et ne pas dissoudre. Du moins, pas tout de suite, et reste en partie maitre du calendrier. De toute manière, une dissolution à l’automne risque de donner une même absence de majorité stable. Car malheureusement, la recomposition politique n’a pas franchement commencé, chaque parti continuant comme avant ses petites affaires, sans le moindre travail programmatique sérieux. Chacun espère que les autres trébuchent pour ramasser le morceau.

A moins d’un choc externe, de plus en plus probable, l’impasse politique va perdurer. Si le pays veut s’en sortir, il va falloir qu’il se débrouille sans sa classe politique actuelle, dont il n’y a pas grand chose à attendre. Je ne vois pas trop comment on fait, tellement nous avons été infantilisés à tout attendre de l’Etat. Une cure de désintoxication semble nécessaire, afin qu’une société civile digne de ce nom émerge. De toute manière, le modèle de fonctionnement actuel est plus qu’à bout de souffle, il est en état de mort clinique.

Comme vous le voyez, c’est toujours l’optimisme fou…

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Au delà du symptôme de la Fake news

J’ai lu un long article, sur le Grand Continent, qui pose un constat très juste. Le problème de ce qu’on appelle la désinformation, ou les Fake news, est global. C’est avant tout une question de système de pensée, de narratif, et d’univers mental. Pas juste un rapport un peu tordu à la véracité factuelle dans l’établissement de faits.

Je trouve cette position de surplomb très juste et éclairante. Le problème est l’émergence, et surtout l’enracinement, au sein d’une part importante de la population, d’une vision du monde basée sur des schémas narratifs « alternatifs ». L’article décrit très bien les différentes structures narratives qui se retrouvent très régulièrement, répondant à des mythes et références cultures anciennes. C’est par exemple l’omniprésence de groupements occultes, qui cherchent à dominer le monde, avec face à elles, de courageux lanceurs d’alerte, l’existence de secrets cachés qu’il s’agit de dévoiler. On est sur des systèmes de pensée très anciens, qui se retrouvent par exemple dans le courant gnostique du christianisme primitif.

Ces récits sont souvent construits pour tenter de retrouver un ordonnancement rassurant du monde, face à un chaos qui fait peur. Les grands récits n’apportent plus suffisamment cette « mise en ordre » de la lecture du monde, celle qui donne du sens, qui explique que même ce qui semble le fruit du hasard, est en fait le résultat d’un main invisible, qu’il faut savoir discerner. Les plus inquiets ou fragiles, ceux qui ont vraiment besoin de repousser loin d’eux l’idée du chaos et du désordre, se replient sur ces mises en récits. Elles leur apportent à la fois une réassurance face aux difficultés de la vie et l’incertitude de l’avenir, et le sentiment d’être des « initiés ». Une façon de réagir et répondre à ce qui est perçu comme un mépris, culturel et intellectuel, de la part des « élites » qui soutiennent les récits « rationalistes » classiques.

Chercher à « vérifier » les informations, à « débunker » les fake news, ne sert à rien, voire renforce ces récits alternatifs, qui se sont créés contre les élites. Les faits rapportés, qui nous semblent délirants et loufoques (par exemple que Brigitte Macron est en fait un homme) font sens dans ces schémas de pensée alternatifs (souvent complotistes), ce qui leur donne une force et une crédibilité. Peu importe, en fait, qu’ils soient authentiques, c’est presque secondaire pour ceux qui les diffusent.

Bien évidemment, un certain nombre de mouvements politiques, radicaux ou marginalisés, s’y sont engouffrés et alimentent ces récits alternatifs, en y glissant leur marchandise idéologique. Le refus des « élites rationnelles » de venir les concurrencer sur ce terrain leur laisse un champ complètement libre, dont ils récoltent les fruits, notamment sur un plan politique et électoral.

Si on veut s’attaquer au problème à la racine, il faut comprendre les ressorts de ces univers mentaux parallèles, et surtout comprendre ce que viennent y chercher ceux qui y sont. On y trouvera de l’angoisse face à la dureté de la vie quotidienne et l’avenir, une grande misère culturelle et intellectuelle, mais également un profond sentiment d’être rejeté, et donc du ressentiment et de la rancœur. Rien de surprenant en fait. Le mal est là, le complotisme n’est qu’un mode de pensée et la Fake news n’est qu’un symptôme.

Construire d’autres récits, plus positifs, ne suffira pas à sortir de cette ornière. Il faut aussi traiter le mal de l’exclusion à la racine, et que les « élites » cessent de s’enfermer dans une sorte de tour d’ivoire surplombante. Pas simple à faire entendre, et encore moins à mettre en œuvre.

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A l’aube du grand chamboulement

La manière dont l’Ukraine est en train d’être lâchée par les USA, au profit d’un rapprochement avec Moscou, est stupéfiant. C’est d’autant plus effrayant que dans le même temps, la gouvernance américaine quitte le champ du raisonnable, avec un président capable de tout, notamment de démanteler sa propre administration, et demain, peut-être le système démocratique du pays.

En quelques semaines, l’alliance Atlantique, socle de notre politique de défense et donc de notre politique étrangère, vacille dangereusement. Depuis 1945, nous avons quasi délégué notre protection militaire aux américains, nous permettant largement de ne pas effectuer les dépenses militaires nécessaires pour assurer notre propre sécurité. De fait, une grande partie de notre politique étrangère s’est alignée sur celle des USA, ou du moins, n’est pas allée frontalement et irrémédiablement contre. Si la France a pu parfois, notamment avec De Gaulle, faire preuve d’une forme d’originalité, elle a été bien trop isolée, pour aller plus loin que quelques gestes spectaculaires.

Encore une fois, et très cruellement, ce vieux proverbe boursier se révèle encore juste. C’est quand la marée descend qu’on voit ceux qui se baignaient sans maillot. En ce moment, militairement, l’Europe est largement à poil. Face à une Russie qui n’a pas peur d’envoyer ses soldats au casse-pipe, je ne sais pas combien de temps nous tiendrions une guerre de haute intensité, avec nos armées. Et encore moins avec une opinion publique pas du tout préparée psychologiquement au fait que demain, l’Ukraine, ça pourrait être chez eux, avec des missiles qui tombent sur des écoles.

Face à cela, l’Europe semble amorcer un sursaut. La prise de conscience du danger est réelle, et les annonces sont parfois spectaculaires. L’Allemagne qui prépare son réarmement, la France qui ouvre la porte à une extension du parapluie de la dissuasion nucléaire à toute l’Europe, ça n’est pas rien. Mais derrière ces annonces, si on veut que l’intendance suive, il va bien falloir trouver l’argent, et réformer la gouvernance. L’Europe ne peut pas en rester au stade actuel de fonctionnement des institutions de l’Union Européenne, où tout s’enlise dans une bureaucratie incapable de susciter l’enthousiasme.

Cela peut très bien mal se finir, avec une Europe incapable d’aller plus loin que quelques rodomontades, et qui se couche devant la nouvelle alliance russo-américaine. On pourrait même finir comme la Pologne en septembre 1939, prise en étau. Je ne crois pas trop à ce scénario noir, mais il ne faut pas non plus l’écarter, vu les personnalités qui sont au pouvoir à Washington et Moscou.

Je crois davantage à une accélération de la construction européenne, seule manière de répondre à ce défi. Sans aller jusqu’au fédéralisme (pas tout de suite, du moins), on va sans doute voir la mise en place plus massive d’outils jusqu’ici sous-utilisés, comme par exemple l’endettement commun. On l’a déjà fait face à la crise économique née des confinements en 2020, mais l’Allemagne (le plus le plus riche d’Europe) et certains pays du nord y étaient plus que réticents. Si l’Allemagne accepte de renouveler l’opération, pour le réarmement, et sortir de la dépendance aux Etats-Unis, on atteint un niveau irréversible. Une fois qu’on a une dette commune, il faut trouver des ressources communes, qui aillent directement au remboursement. Et donc des institutions communes pour gérer ces ressources. On ne pourra pas gérer cela à institutions européennes constantes.

Il y aura aussi probablement un revirement des priorités politiques bruxelloises. J’ai bien peut le Climat ou les sujets sociétaux ne passent à la trappe, au profit de la survie géopolitique. Le monstre bureaucratique qu’est devenue la Commission européenne va devoir se redéployer. Légiférer sur la standardisation des boulons, ou sur le contenu exact des rapports RSE des entreprises, ce sera complètement anecdotique, voire futile, au regard des nouveaux enjeux. Soit les institutions bruxelloises se mettent au service des nouvelles priorités (qui ne sont pas de légiférer et règlementer), soit elles seront marginalisées, par l’émergence de nouvelles gouvernances inter-étatiques, plus politiques. Nous sommes probablement au seuil d’un vaste chamboule-tout à Bruxelles, et c’est tant mieux, tellement l’Europe politique était devenue un grand n’importe-quoi et Bruxelles un centre de soins palliatifs politique.

Les choses risquent également de beaucoup bouger dans les esprits, si jamais la menace, pour l’instant géostratégique et virtuelle, se matérialise dans les vies quotidiennes. Au pire, c’est l’Europe qui se devient un champ de bataille, redécouvrant les horreurs de la guerre. Mais cela peut aussi être juste des humiliations, des pénuries, des restrictions sur des activités qui autrefois ne posaient pas de difficultés. Pourrons-nous encore voyager, en 2030, comme nous le faisions en 2024 ? L’accaparement sans vergogne de certaines ressources, ou de certains produits ou service (high tech par exemple) pourrait se faire douloureusement sentir. Beaucoup de choses peuvent faire prendre conscience aux européens qu’il faut changer, et accompagner le mouvement « politico-institutionnel » qui est en train de débuter, mais qui n’ira pas loin si les peuples ne suivent pas.

C’est donc à la fois effrayant (vu le contexte) mais aussi exaltant de se dire que nous allons enfin, peut-être, sortir de l’ornière de l’immobilisme, dans lequel nous sommes depuis pas mal de temps. Nous allons enfin, peut-être, retrouver une envie de nous donner un destin commun, fondé sur des buts et des imaginaires renouvelés. Les attaques idéologiques, notamment celles venues d’Amérique, en nous bousculant, peuvent nous contraindre à nous revisiter et nous mettre en mouvement.

Peut-être qu’au bout du compte, ce début de l’année 2025 sera vu, rétrospectivement, comme le début de quelque chose, et pas juste le dernier clou planté dans le cercueil d’une vieille Europe vermoulue.

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Quand l’idéologie prend le pas sur le reste

L’actualité ne cesse de fournir des inquiétudes sur l’émiettement de nos institutions, voire de notre société démocratique. Parmi les piliers qui s’effondrent, figurent notamment les médias et les journalistes.

La presse d’opinion est une tradition (malheureusement) bien ancrée en France, avec des partis pris et des biais. Mais jusqu’ici, cela restait dans des proportions et surtout, des limites acceptables. Les remises en causes des institutions, et l’utilisation outrancière des moyens médiatiques pour défendre des intérêts économiques ou idéologiques restaient assez limités.

Ces derniers jours, des bornes sont en train d’être franchies.

Nous avons par exemple des journalistes, déjà connus pour leur déontologie à géométrie variable, qui prennent à partie des magistrats. Le tribunal administratif de Toulouse vient d’annuler le projet de construction de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres. On peut penser ce que l’on veut du projet, ce n’est pas le sujet ici. Pour moi, le rôle des journalistes est d’expliquer les tenants et aboutissants de la décision, les réactions des différents protagonistes. A la place de cela, des journalistes s’en prennent ouvertement aux magistrats toulousains, pour contester leur légitimité à prendre une décision. Un ministre (du même bord politique) s’est livré récemment à ce jeu, contre les magistrats d’un autre tribunal administratif, avec comme résultat une vague de haine en ligne et des menaces de mort.

Ce qui est grave est que ces attaques visent à décrédibiliser une décision de justice, et à attaquer une institution officielle, parce qu’elle n’a pas rendu la décision qu’ils auraient souhaité. On passe au stade supérieur, qui n’est plus seulement de prendre parti dans un débat, mais on est carrément dans un travail de sape de la chose publique. Que cela vienne d’activistes politiques, c’est déjà choquant, mais venant de journalistes, c’est encore plus effarant. Le fait que ces journalistes-militants soient clairement de droite est une source d’inquiétude supplémentaire. Normalement, la contestation de l’autorité des institutions régaliennes, ce n’est pas dans L’ADN de ce camp politique. Et ce qui est drôle (si je puis dire) c’est que ces « journalistes » qui hurlent après le tribunal administratif de Toulouse, n’hésitent pas à dénoncer d’autres groupes politiques (du bord opposé, évidemment) parce qu’ils appellent à la désobéissance civile, alors qu’ils en sont les alliés objectifs.

Ce cas n’est malheureusement pas isolé, car de manière quasi concomitante, le groupe de presse de Vincent Bolloré s’est lancé dans une campagne de presse très violente contre l’Arcom, suite à la perte de la fréquence TNT de la chaîne C8. Outre des propos outranciers, visant à décrédibiliser la décision, assimilée à une atteinte à la liberté d’expression (qui peut croire à une telle escroquerie intellectuelle ?), des « journalistes » du JDD publient d’authentiques fausses nouvelles, et vont même jusqu’à pénétrer dans les locaux de l’Arcom, pour tenter de piéger et déstabiliser son président. On est dans les méthodes de barbouzes, d’un groupe industriel, qui utiliser ses médias pour chercher à faire plier une autorité publique, à cause d’une décision contraire à ses intérêts économiques.

On assiste en ce moment en France à une très dangereuse attaque contre la « res publica » avec des intérêts économiques et idéologiques qui se sentent tout permis pour arriver à leurs fins. Ils sont en cela soutenus par un segment politique, qui va de l’extrême-droite à une partie de la droite conservatrice, pour qui l’Etat de droit est finalement en option, juste quand ça les arrange. L’élection de Donald Trump semble en avoir désinhibé un certain nombre, qui se disent que le moment est venu de lancer l’offensive, et de prendre le pouvoir. Par n’importe quel moyen. En cela, ils rejoignent une extrême gauche qui est déjà sur ce chemin depuis un certain temps.

On se rapproche encore un peu plus d’une forme de guerre civile, car cela s’accompagne d’une polarisation croissante, où chacun va être sommé, à un moment ou un autre, de « choisir son camp ». Je ne serais pas surpris d’apprendre, un jour, qu’un fournisseur ou un sous-traitant d’un groupe industriel puisse être sanctionné, pour avoir pris position contre le « narratif » de défense des intérêts dudit groupe dans le débat public. La question n’est peut-être même plus de savoir si cela va arriver, mais quand.

L’idéologie est en train de prendre le pas sur les autres rationalités et même sur l’éthique, et c’est très inquiétant. Le « pilier démocratique » que représente la presse, est en train de s’effondrer, et de se mettre complètement au service d’intérêts idéologiques qui ne sont pas favorables à la démocratie libérale.

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Le Point vs Wikipédia, autopsie d’un loupé journalistique

Après avoir traité le sujet de fond, sur la neutralité de certains articles Wikipédia, je souhaite revenir sur la manière dont le Point a traité le sujet, qui est loin d’être exempte de reproches. Pas mal d’article de presse sont sortis, permettant de se faire une idée asse précise des faits. Celui du Monde et ceux de Next sont très biens, car avec un peu de recul et équilibrés.

Le coeur du problème, est la prise de contact du journaliste Erwan Seznec avec un contributeur, FredD, qui a été violente. Ce contributeur, sous pseudo, reçoit un mail et des appels sur son portable, d’un journaliste d’un média d’envergure nationale, lui indiquant qu’il va révéler sa véritable identité et prévenir son employeur de ses activités wikipédiennes, dans l’idée qu’il en subisse des conséquences professionnelles. Rien que là, il y a une faute grave du journaliste, une attitude inacceptable tant sur le plan humain que professionnel, qui nécessiterait, a minima, des excuses.

La défense produite par le journaliste, à savoir le respect du « contradictoire » ne tient pas vraiment dans notre affaire. Les règles déontologiques du journalisme imposent, quand on va mettre en cause une personne ou une institution, de les contacter avant pour connaitre leur position et leur permettre de se défendre. Une pratique très contestable, mais répandue du « contradictoire », consiste à boucler son enquête (qui peut durer plusieurs jours à plusieurs semaines) et d’attendre les dernières 24h pour contacter la personne concernée, alors que le papier est bouclé, prêt à être publié. On se doute bien que, quoi que la « victime » puisse dire, ça ne sert à rien, le verdict est déjà prononcé, on l’informe juste un peu avant que l’exécution aura lieu dans les prochaines 48h. C’est là un détournement complet de cette procédure de contradictoire, où il faudrait contacter les personnes concernées au moment où elles peuvent utilement faire entendre leurs positions et arguments. Pas à l’avant-veille de la publication, en leur laissant 24h pour réagir à une demande qu’ils n’ont souvent pas vu venir.

Le journaliste commet une autre faute, en se focalisant sur un contributeur précis. Pas de bol pour FredD, qui va prendre pour les autres, à cause d’une seule modification (contestable sur le fond, mais c’est un autre sujet). Son historique de contribution montre qu’il est bien plus sur la biodiversité marine et les mollusques, que sur les pages brulantes et controversées. Il y a un problème évident, sur Wikipédia, de pov-pushing et de neutralité, avec un certain nombre de contributeurs (j’ai quelques noms en tête) qui sont bien plus actifs et problématiques sur ces questions. Rien que sur l’historique de la page du Point, il y avait bien plus problématique que ce pauvre FredD.

De manière plus globale, dans leur relation à Wikipédia, la manière de faire du Point et d’Erwan Seznec interroge beaucoup. Je peux tout à fait comprendre qu’ils se positionnent dans un journalisme d’opinion, qui cherche à plaquer sur les faits une grille de lecture idéologique, afin de conforter les préjugés et nourrir les obsessions de leurs lecteurs. C’est malheureusement en train de devenir le modèle économique d’un nombre croissant de titres de presse en France. Ce n’est pas ce que j’attends d’un journal, mais la Presse est libre en France. Ce qui est plus gênant, c’est l’utilisation de la puissance de feu médiatique d’un journal pour la défense ses propres intérêts, dans le cadre d’un conflit où il est partie prenante. On entre dans le mélange des genres, le conflit d’intérêt à l’état presque pur. Un élu qui utiliserait les moyens dont il dispose dans le cadre de son mandat, pour régler des comptes personnels, serait immédiatement cloué au pilori. Il faudrait peut-être que le Point se penche sur ce sujet déontologique.

Sur l’attitude aussi, il y aurait des choses à dire. Je peux, là encore, entendre que les journalistes du Point, ressentent une forme d’injustice, voire de colère, à la lecture de la présentation qui est faite de leur journal sur Wikipédia. L’article, avant le 15 février (début de l’affaire) est mal équilibré, avec une proportion bien trop importante consacrée aux polémiques. La manière dont le positionnement bien à droite du journal est décrit, bien que reposant sur des sources solides, aurait pu être écrit un peu différemment. Bref, il y avait de quoi nourrir une discussion de fond, avec des arguments qui auraient pu convaincre un certain nombre de contributeurs qu’il fallait effectivement faire évoluer cet article. C’est d’ailleurs ce qui est fait depuis une semaine, comme quoi, c’est possible.

Pourquoi donc ne pas avoir cherché à comprendre comment fonctionne l’encyclopédie, et quelles sont les voies possibles pour arriver, paisiblement,à rééquilibrer l’article ? Il faut reconnaitre à Erwan Seznec d’avoir tenté. Il s’est créé un compte, il est venu discuter. Mais s’y prenant mal, parce que ne connaissant pas les us et coutumes, il s’est fait jeter. La communauté francophone n’aime pas qu’on la prenne de haut et l’agressivité ne paie jamais. Même si le bon accueil des nouveaux, reste perfectible, il y aura toujours, du coté des arrivants et des observateurs, un chemin à faire, qu’Erwan Seznec n’a même pas amorcé.

Sans forcément chercher à devenir lui-même un contributeur, le journaliste n’a pas cherché à creuser, pour savoir si ce qui lui est arrivé est « normal » ou exceptionnel, s’il n’existe pas des instances d’aide et de médiation, qui permettent d’avancer. Pourtant, tout cela existe, et fonctionne, tout est expliqué. A condition de trouver la documentation et de prendre le temps de la lire. Cela demande un effort, mais qui n’est pas hors de portée d’un journaliste un peu curieux et qui cherche, de bonne foi, à comprendre.

On se retrouve donc avec un vrai gâchis, car les contributeurs sont toujours heureux de pouvoir expliquer ce qu’ils font, comment fonctionne Wikipédia, autrement qu’en réponse à des attaques. La rédaction des articles est quelque chose de mouvant, sans cesse en discussion, et sur l’article du Point, en s’y prenant bien, il aurait été possible d’arriver à un résultat globalement satisfaisant, sans tout le drama généré depuis une semaine. Encore aurait-il fallu que cela soit le véritable objectif du Point…

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Wikipédia et la neutralité

Ces derniers jours, la Wikipédia francophone fait l’objet d’une nouvelle campagne de presse hostile, de la part du magazine Le Point, repris par la presse bien à droite, jamais en manque pour taper sur ce qu’ils considèrent comme un repaire de gauchistes.

A la base de la querelle, l’article sur Le Point dans Wikipédia. Certains journalistes (notamment Erwan Seznec) considèrent qu’il manque singulièrement de neutralité, et qu’il est entre les mains de militants, qui lui ont volontairement donné un biais négatif. Un nouvel avatar de la croisade « anti-woke » mais qui pose des questions intéressantes, malgré une manière de faire assez détestable de la part du Point.

Je vais me concentrer sur le fond du sujet, en laissant de coté les polémiques.

La question posée, à savoir le manque de neutralité de certains articles sensibles, est un réel problème, dont un nombre grandissant de contributeurs est conscient. Comme toute entreprise humaine, Wikipédia est imparfaite. Sur les articles en lien avec l’actualité politique, les biographies de personnalités ou d’entités clivantes, les concepts controversés, il y a des conflits éditoriaux qui peuvent être parfois violents. Il n’est absolument pas rare que des personnes (de bonne ou mauvaise foi, peu importe) arrivent avec une vision orientée, et entendent imposer leur point de vue sur la manière dont la fiche doit être rédigée. Dans le jargon wikipédien, on appelle cela du « Pov Pushing ». Quand c’est fait par des personnes extérieures, qui ne connaissent pas les us et coutumes de la communauté, c’est assez vite réglé. Les modifications sont annulées et la personne est mise à la porte. C’est autre chose quand le « Pov-pusher » est un contributeur aguerri, qui connait parfaitement les règles, et fait, par ailleurs du bon boulot sur l’encyclopédie.

Il faut bien reconnaitre que la communauté des contributeurs de la wikipédia francophone a eu beaucoup de mal, jusqu’ici, à traiter efficacement le problème. Nombre d’articles sensibles (Le Point est loin d’être le seul, ni le plus touché) ne sont pas au niveau, du point de vue neutralité. Nombre d’entre eux ont des sections « controverses et polémiques » longues comme le bras, occupant parfois plus de la moitié de l’article. Les sources sont parfois utilisées de manière sélective (on appelle cela du Cherry Picking dans le jargon) ou déformée, pour n’en retenir que ce que le pov-pusher veut leur faire dire. On a aussi fréquemment une reprise quasi immédiate des polémiques médiatiques, qui bien souvent sont aussi vite oubliées qu’elles ont surgi. Sauf que la page Wikipédia en garde la trace, et que c’est le premier résultat qui ressort dans Google.

Une certain nombre de personnes se plaignent du traitement qu’ils subissent, de la qualité très médiocre, voire quasi diffamatoire, de la page qui leur est consacrée. Parfois, la demande relève du ripolinage et du lissage, pour enlever des aspérités ou des informations désagréables, pourtant parfaitement sourcées et notoires. Mais parfois, elles n’ont pas complètement tort. La communauté de la Wikipédia francophone n’a sans doute pas assez pris conscience de sa responsabilité vis-à-vis des personnes concernées et de la nécessité de trouver un équilibre entre le droit à l’information d’un coté, le respect de la vie privée, et le droit à l’oubli de l’autre coté.

Le fonctionnement même de l’encyclopédie pousse à cette dérive. Tout le monde peut intervenir, et s’il y a désaccord, il faut discuter et trouver un consensus. C’est long et chronophage, et parfois, les débats s’enlisent et se terminent par abandon, celui qui a le plus de temps et d’habileté à faire trainer, l’emporte. Parfois, les débats sont rugueux, voire violents, et on ne trouve pas beaucoup de volontaires pour prendre des coups. Aller faire l’arbitre sur les pages liées au conflit israélo-palestinien est un sacerdoce, et il vaut mieux y aller avec le gilet pare-balle. Le problème est accentué par la taille, finalement assez réduite, de la communauté française, avec des débats qui peuvent se restreindre à une dizaine de personnes sur une page de discussion, et tourner en rond, sans que personne n’intervienne pour débloquer la situation, faute de règles claires.

Sur ce point, les choses bougent progressivement au sein de la communauté des contributeurs francophones. Une attention plus forte est portée à ce sujet de la neutralité, avec l’élaboration (encore embryonnaire) de recommandations et de lignes directrices pour interdire certaines pratiques, et donner ainsi des points d’appui à ceux qui luttent contre le pov-pushing. Cela fait très longtemps que je militais pour cette évolution, je suis heureux de voir que cela avance, même si on n’est pas au bout du chemin. Il continuera à y avoir des pov-pushers, qu’il faudra rappeler à l’ordre. Pour cela, il faut que des personnes s’engagent, contribuent, et y passent du temps.

Pour tous ceux qui regardent ça de l’extérieur, et se plaignent, sachez qu’il vous est possible de faire avancer les choses dans le bon sens. Taper depuis l’extérieur et faire des procès est assez contreproductif. Il vaut mieux dialoguer sur le fond, apporter des éléments tangibles, et argumenter. Même s’il est fortement déconseillé à une personne d’intervenir pour modifier la fiche le concernant, elle peut venir présenter sa position et ses arguments sur la page de discussion de l’article.

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L’irresponsabilité de la Gauche sur les plans sociaux

Le groupe écologiste de l’Assemblée nationale vient de faire demande de droit de tirage, pour une commission d’enquête intitulée « les défaillances des pouvoirs publics face à la multiplication des plans de licenciements. ». Cela m’a d’abord laissé pantois, puis m’a beaucoup énervé.

L’année 2025 va être difficile, avec effectivement beaucoup de plans sociaux en vue. Et quand on regarde un peu qui a une responsabilité dans la situation, elle est certes partagée, mais celle de la gauche française est très lourde.

Si l’économie française vacille en ce moment, elle le doit en partie à la situation politique incertaine que connait le pays depuis juin 2024. Certes, c’est Emmanuel Macron qui a appuyé sur le bouton, mais derrière, on a eu un sacré cirque avec le sketch Castets, le « rien que le programme, tout le programme », et cette affirmation, fausse mais répétée en boucle, que c’est la gauche qui aurait remporté les législatives. Si c’est la classe politique dans son ensemble qui n’ a pas été la hauteur pour chercher une sortie par le haut (qu’ils n’ont toujours pas trouvée), la gauche a largement tenu son rang !

Plus fondamentalement, la gauche française, encore largement imbibée de marxisme, passe son temps à cracher sur le secteur privé, sur les entrepreneurs et ceux qui gagnent de l’argent. Leur obsession, répétée à longueur de tribunes, est de spolier les fameux ultra-riches et d’affirmer crânement que reculer l’âge du départ en retraite, c’est « voler des années de vie ». Comme si gagner de l’argent était un péché dont on doit être puni, comme si le travail était un enfer, et que la « vraie vie » commencerait une fois en retraite. Cette même gauche qui promet d’augmenter le Smic et tous les aides aux ménages, d’abaisser l’âge de départ à la retraite, sans créer davantage de richesses, laissant croire que « taxer les ultra-riches » et les entreprises permettra de trouver plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Le plus drôle est que cela vient des écologistes, qui assez systématiquement, font des choix politiques radicaux qui pénalisent systématiquement l’industrie et prônent plus ou moins ouvertement la décroissance. L’industrie pollue, et devrait donc disparaitre de notre pays, mais pas question d’accepter qu’elles procèdent à des plans sociaux. Il faudra m’expliquer cette contradiction. On peut très bien vouloir un pays sans pollution, sans risque de cancer, mais dans ce cas, on assume que c’est aussi un pays sans activité économique, où les aides publiques (la fameuse allocation universelle) sont les seuls revenus. C’est juste intenable.

Il y a une forme de haine de l’entreprise de la part d’une grande partie de la gauche, et voilà qu’une fois que leurs efforts portent leurs fruits, ils s’en vont chercher des responsables ailleurs que dans leurs rangs. Ce serait la faute des pouvoirs publics (sous-entendu du gouvernement macroniste). Mais eux, bien évidemment, sont des gentils, qui après avoir poussé des entreprises étrangères à partir ou à réduire la voilure en France, viennent pleurer au chevet des chômeurs qu’ils ont contribué à créer.

Un tel degré de mauvaise foi est la preuve d’une irresponsabilité qui devrait les faire écarter à tout prix de l’exercice du pouvoir.