La première semaine post-législatives a été marquée par une forme de déni, le Nouveau Front populaire, fort de ses 182 députés sur 577 s’est proclamé grand gagnant, et donc habilité à former le gouvernement. Ils reproduisent ainsi le comportement qu’ils ont reproché à la Macronie, qui a continué à se comporter en 2022 comme s’ils avaient toujours une majorité absolue, alors qu’il leur manquait 40 sièges pour atteindre la barre.
Il faut quand même se rendre compte du ridicule de la situation, dimanche. On a eu une semaine d’échanges intenses, pour arriver au renoncement d’Huguette Bello à un poste de Premier ministre où elle n’a jamais été envisagée par celui qui a le pouvoir de nomination, à savoir Emmanuel Macron. Et pendant ce temps, strictement n’a rien bougé sur le reste (équilibres au sein du gouvernement, et surtout, programme de coalition). On s’est juste rendu compte que ceux qui prétendent gouverner ensemble avec une majorité très relative ne sont finalement pas d’accord sur grand chose.
La semaine qui vient va encore nous livrer un spectacle grandiose, avec la reconstitution des instances de l’Assemblée nationale. Il semble désormais évident qu’il n’y aura pas de consensus sur la répartition des postes, et qu’il faudra aller au vote. Vu la configuration de l’hémicycle, et les combinaisons (volontaires ou pas) qui sont possibles, on peut avoir de belles surprises, tant sur le choix des personnes que sur l’équilibre politique.
Dimanche prochain, on saura si les députés (et leurs chefs à plumes) on un peu progressé en maturité parlementaire. Il va bien falloir qu’ils travaillent ensemble pendant un an, on les a élus pour ça. Il va être urgent qu’ils sortent du déni et des vieux automatismes issus de la période où il y avait des majorités absolues aux ordres d’un président de la République. Ils auront au moins l’été pour cela, car j’ai le sentiment que le gouvernement Attal pourrait se retrouver à gérer les affaires courantes au moins jusqu’en septembre.
La période qui s’ouvre peut pourtant être passionnante, si on a des élus enfin adultes et responsables. Les institutions sont solides, et n’ont pas nécessairement besoin d’être réformées en profondeur à court terme. En revanche, il faut réinventer la manière de les faire fonctionner, avec un espace de liberté et de créativité énorme et une loi suffit parfois (pour passer à la proportionnelle par exemple). Le problème n’est pas la constitution de la Ve République, mais l’univers mental et les manières de travailler de la classe politique.
Commençons donc par explorer des pistes sur de nouvelles manières de travailler ensemble, ça sera peut-être l’occasion d’un grand bol d’air démocratique.
19 réponses sur « La suite de l’atterrissage »
Mais si Attal gère les affaires courantes jusqu’en septembre, ça veut dire qu’il n’est pas démissionné et ne peut donc pas siéger et être président de groupe alors qu’il s’est déclaré, de même que tous les ministres réélus d’ailleurs, non ?
Quel serait le sens alors que la Macronie veut aussi, sans doute, avoir des poids lourds aux postes clés de l’Assemblée ? Ils ont moins de monde pour pouvoir jouer sur les deux tableaux.
Normalement, il n’y a pas de session parlementaire avant le 1er octobre. C’est Macron qui décide de convoquer, ou pas, les sessions extraordinaires. Donc Attal aura le temps de se consacrer aux affaires courantes au mois d’août, et un peu en septembre, le temps que Macron trouve un PM qui ait une majorité.
Ce n’est pas la question : le point est que pour pouvoir voter jeudi, les ministres doivent avoir quitté le gouvernement, donc comment pourraient-ils gérer les affaires courantes ensuite à moins d’une renomination d’un gouvernement?
Les fonctions ministérielles cessent à la démission du gouvernement, donc formellement, ils peuvent redevenir parlementaires. La gestion des affaires courantes est quelque chose de très limité, et conçu comme devant être bref. Macron est en train de tester les limites du dispositif. Un gouvernement de ce type, au mois d’août, s’il ne se passe rien de grave, ça peut tenir.
Je ne comprends toujours pas : si Macron accepte la démission du gouvernement aujourd’hui pour que les ministres siègent jeudi, il faut reformer un gouvernement Attal pour pouvoir lui confier les affaires courantes non ?
Ce serait une ultime provocation, et la prochaine session parlementaire commencerait par une motion de censure.
Non, le gouvernement démissionnaire assure la gestion des affaires courantes, jusqu’à la nomination du prochain gouvernement.
J’ai l’impression que personne n’est pressé de former un gouvernement qui va tomber dans la foulée.
Pour ce qui est du premier ministre, Macron peut vouloir ce qu’il veut, mais il n’aura pas le choix que d’en nommer un qui soit acceptable soit par le RN, soit par le NFP. Sinon ils tomberont les uns après les autres.
À l’assemblée, soit les postes se jouent à la proportionnelle, soit ça va au vote. Et si les macronistes jouent avec le feu en passant avec les voix RN (intention qu’on prête à Braun-Pivet) alors que les électeurs ont eux joué le jeu du front républicain, ça va être très très moche.
En quoi ça serait plus moche de gouverner avec le soutien du RN que de LFI ? Ne vous en déplaise, la gauche est minoritaire en sièges et surtout en voix. Le plus stable serait sans doute une alliance du centre opérant quelques concessions au RN sur les thèmes capitaux de la sécurité et de l’immigration.
Vous voulez dire ce qu’a fait Macron depuis 2 ans ?
Au cas, où cela vous aurait échappé, les résultats du second tour des législatives ne s’expliquent que par un front républicain massif des électeurs de la gauche et du centre contre l’extrême droite.
Cela fait des années que l’on fait des concessions au racisme et à la xénophobie. Le seul résultat, c’est une extrême droite à 30% et une explosion des actes et propos racistes. Continuer, c’est juste leur donner le pouvoir.
D’un autre cote il faut etre naif pour croire que favoriser l’immigration ne se se ferait pas sans un rejet d’une partie de la population. Les 30 % du RN ne s’expliquent pas que par cela mais refuser d’entendre une partie de la population sur ces sujets ne menera pas a autre chose que des rejets encore plus fort.
C’est exactement ce qu’ils sont en train de faire
Vous estimez que la dissolution que nous avons vecu etait un caprice ? Je ne partage pas votre avis. Elle suit une defaite electorale (mais il est vrai que ce n’est pas la tradition dans ce pays de dissoudre apres une defaite) et n’est que la consequence des elections legislatives de 2022. Qu’il est dissout en juin ou qu’il aurait dissout 6 mois plus tard revient pour moi au meme.
Je suis d’accord, il y a une mince chance que tout ce b$&*#l permette un certain progrès. Néanmoins cela implique que nos élus acceptent de travailler ensemble. Depuis une semaine on lit beaucoup de choses sur la difficulté culturelle à faire des compromis. Mais je crois qu’on sous estime le fait que nos élus ne travaillent pas, au sens ils ne travaillent pas sur un programme (cf. les ”programmes” pour les législatives préparés en trois jours : que font les partis depuis 7 ans ?). Cette absence de travail de l’ombre me consterne et quand je vois le renouvellement à l’œuvre (Wauquiez, Voynet! Hollande…), je suis inquiet.
Tout à fait, les élus ne bossent plus sur le fond depuis 20 ans au moins. Cela rejoint le problème, plus global, de la baisse de niveau de la classe politique, et du déclassement social des élus.
Un régime parlementaire nécessite une réforme constitutionnelle : il faut que le Parlement (en tout cas, l’AN) s’auto-dissolve passé un certain délai sans investir de gouvernement.
Sinon, on va au-devant de blocages (par exemple, si on ne vote pas le budget ?) pas forcément prévus et qu’on voit mal se régler par l’article 16.
Il y a des ajustements constitutionnels à faire, sur la nécessité d’un vote de confiance préalable à l’entrée en fonction, sur l’encadrement du pouvoir de dissolution (que ce ne soit plus un caprice présidentiel, mais la fin logique et prévisible d’une crise politique) mais pas besoin d’un changement fondamental, en mode « constituante de table rase ».
Vous estimez que la dissolution que nous avons vecu etait un caprice ? Je ne partage pas votre avis. Elle suit une defaite electorale (mais il est vrai que ce n’est pas la tradition dans ce pays de dissoudre apres une defaite) et n’est que la consequence des elections legislatives de 2022. Qu’il est dissout en juin ou qu’il aurait dissout 6 mois plus tard revient pour moi au meme.
Si ce n’est pas un caprice, c’est au minimum une grosse connerie.
Dissoudre après une défaite à des élections européennes, qui sont sans grand rapport avec la tambouille politique intérieure, c’est du grandiose, du monumental, le signe d’une intelligence supérieure dans les vils calculs politiciens qui font le miel des sites d’informations et autres blogs.
Mais qui ne font pas avancer les solutions aux problèmes de la population : éducation, santé, pouvoir d’achat, présence et qualité des services publics sur tout le territoire, sécurité, etc..
Ces gribouilles se font plaisir avec leurs palabres.
Une défaite électorale, oui, mais sur une élection dont personne n’a rien à faire!