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Les Verts, Don quichotte des commissions d’enquête

Le groupe écologiste du Sénat vient de déposer une proposition de commission d’enquête visant explicitement l’entreprise Total. Sous un vague vernis de lutte contre le réchauffement climatique, les écologistes utilisent un outil du contrôle parlementaire pour s’en prendre à leur « meilleur ennemi ». Ce faisant, ils se trompent de ciblent, et pourraient finir par ressembler à Don Quichotte, chargeant des moulins à vent, en pensant s’attaquer à des géants.

Cette manière de travailler me désole, car cette commission d’enquête, si elle se met en place, n’a pas pour finalité de contrôler l’action du gouvernement, mais de chercher à faire trébucher une entreprise ayant acquis une image déplorable, au point d’en faire un objet politique symbolisant le Mal. Pour les écologistes, Total, c’est Satan, et comme ils sont dans le camp du Bien, ils se doivent de combattre le Mal. J’ai toujours eu beaucoup de mal avec ces politiques qui se pensent gardien de la Vertu et du Bien. Si on leur laisse les manettes, comme en 1793, ça peut mal se terminer.

En France, nous adorons détester les entreprises privées. Quand en plus, elles sont de dimension mondiale, c’est encore mieux. Le pompon, c’est quand de surcroit, elles ont des activités « sales », comme par exemple les hydrocarbures. Total coche toutes les cases pour être une entreprise haïe, et en plus, ses dirigeants successifs, par leur communication, en ont rajouté. Bref, l’image de Total est structurellement dégradée, et c’est cette image qui est attaquée, au risque que les coups portées à ce symbole, ne touchent l’entreprise d’énergie (Total, c’est loin de n’être que le pétrole) présente au plus niveau, qui permet à la France d’avoir un peu de poids dans le secteur des hydrocarbures. On n’a pas de pétrole, si en plus, nous ne contrôlons aucune structure du secteur, nous sommes totalement dépendants de l’extérieur pour un secteur hautement stratégique, pour quelques temps encore.

Cette tendance de la Gauche, et particulièrement des écologistes, à construire des totems symboliques, pour mieux les adorer ou les détester, est un véritable problème politique. On ne peut pas construire des combats négatifs, et encore moins des politiques publiques, sur des images réductrices et des symboles.

Si cette commission d’enquête se met en place, elle aura juste pour effet de permettre aux écologistes de prendre des postures de grand défenseur du Climat, et d’affaiblir une grande entreprise française, face à ses concurrents internationaux. Il n’en sortira rien de positif.

J’aurais préféré une commission d’enquête inverse, où on se demande comment la France peut utiliser le fait d’avoir le siège social de ce type de grande entreprise sur son territoire. C’est un outil formidable d’appui à la diplomatie, et donc à l’influence française, dans pleins de domaines. Il serait intéressant de voir si le gouvernement en tire toutes les possibilités, à quelles conditions et à quel prix. On pourrait avoir l’ébauche de propositions politiques sur l’influence française, sujet qui entre bien plus dans le cadre des commissions d’enquête, qu’un règlement de comptes surtout destiné à faire plaisir aux militants.

6 réponses sur « Les Verts, Don quichotte des commissions d’enquête »

Entièrement d’accord, mais j’ai l’impression qu’avec les écologistes politiques que l’on a, c’est un peu trop compliqué de réfléchir à la fois à long terme et avec une vision d’ensemble.
On rajoute à ça, comme vous le rappelez si justement, une propension naturelle extrêmement forte aux anathèmes et juste dire non sans rien apporter de positif, donc à juste amener des contraintes sans solutions viables.
Enfin, dernière touche, un goût pour le « faites ce que je dis, pas ce que je fais », par exemple sur la lutte contre les lobbies, qui ne les empêche pas non seulement de servir la soupe sans aucun recul de lobbies du bio, mais même d’avoir l’ancien pdg d’une « petite PME » d’1 G€ de CA à l’époque (Claude Gruffat, député européen, et qui est resté dirigeant des sociétés Manavai et l’Epi Vert).
Donc finalement, ça montre juste la médiocrité de ce parti.

Je suis d’accord que cette comission d’enquete est purement une posture, ce qui est effectivement agacant et inutile.
Je suis en désaccord sur le fait que ce soit réservé au vert ou à la gauche, c’est plutot une posture assez commune dans tout le spectre politique. On pourrait faire les même reproches sur le redoublement ou l’AME pour prendre des exemples récents.

Toute entreprise installée en France, même étrangère, dit qu’elle crée de l’activité économique et des emplois, et paie des impôts, argument premier pour demander un avantage ou refuser une contrainte. Je ne vois pas bien en quoi Toal apporte un réel intérêt stratégique, la France ne produit pas de pétrole et elle achète sur les marchés, les cours sont mondiaux. Je ne vois pas trop non plus pourquoi les stations « Total » seraient plus stratégiques que les stations « Esso ». Je ne vois pas en quoi non plus Total serait un avantage pour la diplomatie (et à quelle diplomatie, et est-ce à une diplomatie que nous voulons démocratiquement ?), peut-être que c’est plutôt la diplomatie française qui est un avantage pour Total.

Vous déplorez que l’entreprise ait une mauvaise image, mais outre le secteur concerné, cette mauvaise image ne part pas de rien, il y a un historique derrière aussi. Réduire à un problème d’image, c’est risquer de verser dans le déni de réalité.

Le tropisme pour les grandes entreprises et les champions nationaux n’est pas nouveau, cela fait 70 ans qu’on entend ces cocoricos et on ne peut pas dire que le résultat des courses soit flamboyant. Au contraire, c’est ce qui conduit les politiques à négliger le tissu intermédiaire.

Bref, vous opposez aux pétitions de principe des écologistes d’autres pétitions de principe du même ordre (si ce n’est que les écologistes partent au moins d’une réalité de bon sens, à savoir que l’activité de cette société est liée au changement climatique). Dans le fond je ne suis pas convaincu que cette entreprise ait une importance supérieure à une autre de même taille dans un secteur différent. On peut d’ailleurs imaginer à titre d’exercice une fusion prochaine entre Total et une compagnie étrangère. Je ne pense pas que cette perspective susciterait une levée de boucliers et un veto politique, ce n’est pas Areva. Et on se rendrait compte que le changement de siège ne changerait pas grand chose pour la place de la France dans le monde et patati patata. Les secteurs du luxe et du jeu vidéo contribuent bien plus à la diplomatie française.

Je ne défends pas particulièrement Total, qui donne souvent les batons pour se faire battre. Mais objectivement, c’est une entreprise de taille mondiale, qui est partie prenante dans le secteur de l’énergie, et notamment du pétrole. La France n’étant pas productrice, elle n’a pas beaucoup de leviers pour, quand même, être présente dans les décisions. Certes, le contrôle est indirect et Total n’est pas l’OPEP, mais si Total passait sous pavillon étranger, c’est un peu de soft power français qui disparaitrait.
S’il y a des choses à changer dans la manière dont Total travaille, et dans la manière dont l’influence française, peut peser sur la manière dont le secteur pétrolier travaille, mieux vaut entrer dans le sujet de manière positive « quels leviers pour faire quoi » plutôt que d’arriver en fustigeant.

Pas vraiment d’accord.
Au delà de la posture, il est intéressant de voir des parlementaires s’interroger sur les actions de certaines grandes entreprises. TotalEnergies recoit des subventions nationales et européennes pour la recherche et autres pour se diversifier, mais pour quels résultats? Plusieurs enquêtes journalistiques, pas attaquées en diffamation, montrent des stratégies de lobbying depuis longtemps pour atténuer leurs rôles dans le changement climatique …
Si on suit ton raisonnement, alors quid des commissions d’enquêtes aux États-Unis sur l’industrie du tabac ou les différentes enquêtes parlementaires dans le monde sur les GAFAM?

Se renseigner sur ce que fait Total, sur l’argent touché de l’Etat, et sur la réalité de son rôle d’agent d’influence française, c’est parfaitement légitime. Mais dans ce cas, on formule la commission d’enquête de manière positive, pas comme un réquisitoire, indiquant clairement que le but est de dézinguer Total en cherchant la petite bête. Si non veut faire une commission d’enquête sur le poids de l’industrie pétrolière sur la politique de la France, autre sujet légitime, on ne le fait pas en pointant directement une entreprise précise.

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