A l’issue des élections législatives, l’hypothèse la plus probable est qu’il ne se passe pas grand chose de concret pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. C’est une forme de défi pour notre système politico-administratif centralisé, habitué à « réformer » en flux continu, et à tout régler dans les moindres détails par décret et arrêté.
S’il n’y a pas de majorité viable, on risque d’avoir un gouvernement Attal qui gère les affaires courantes pendant un certain temps, suivi de gouvernement fragiles, ne s’entendant sur pas grand chose d’autre que la volonté d’empêcher le RN d’arriver au pouvoir. C’est le scénario à la belge, de négociations interminables pour former des coalitions improbables. Sauf qu’en Belgique, ils ont l’habitude, et savent le gérer (le quotidien relevant des régions fédérées, il n’y a pas de blocage réel).
Si le RN gagne, ils vont devoir « prendre en mains » l’appareil administratif, ce qui va demander du temps, car même s’ils trouvent des supplétifs et des collaborateurs, il faudra que la confiance s’installe. Le RN a été tellement en marge du « système » qu’ils n’ont pas les troupes, en interne, pour remplir ne serait-ce que les cabinets ministériels. On ne parle même pas des administrations centrales. Le mode de fonctionnement des RN étant clanique, avec une forte tendance à la paranoïa, il va falloir du temps pour arriver à un fonctionnement fluide (si jamais on y arrive vraiment). De plus, ils n’ont rien en magasin pour alimenter la machine à produire des normes, leur programme est rempli d’incantations techniquement irréalistes. Les dirigeants du RN s’en rendent compte, et ont commencé à retropédaler sur plein de sujets, afin de désamorcer (un peu) les déceptions qui ne manqueront pas de surgir dans leur électorat, lorsqu’ils vont se heurter aux murs de la réalité juridique et financière. L’audit des finances publiques annoncé par Jordan Bardella, est un bon moyen de ne surtout rien faire avant qu’il ne soit rendu.
Dans les deux cas, cela va être un choc pour le pays, car un trop plein médiatique et rhétorique va être accompagné d’un grippage de la machine à produire la norme. Faute d’instructions claires, pour des productions qui tiennent techniquement la route, les administrations vont rester l’arme au pied, ou produire du grand n’importe quoi, qui sera retoqué, soit par les tribunaux français, soit par l’UE (ou les deux).
Le scénario le plus probable, pour les prochains mois, est qu’il ne se passe rien de concret sur le plan législatif, avec une débauche d’imbécilités proférées dans les médias. On va encore s’enfoncer un peu plus.