Le Premier ministre a boosté la rentrée politique, en annonçant, dès le 25 août, un vote de confiance devant l’Assemblée nationale, le 8 septembre. La prise de risque est réelle, car en cas de vote négatif, le gouvernement tombe. Mais la manœuvre est habile, car plus on avance dans l’automne, plus le risque est grand pour Bayrou. Autant anticiper en prenant tout le monde de vitesse.
En abattant cette carte alors que la rentrée politique commence tout juste, Bayrou préempte le calendrier. Jusqu’au 8 septembre, ce vote de confiance sera au centre des débats, politiques et médiatiques. On ne va parler que de ça, et ça va occulter tout le reste, que ce soit la journée d’action du 10 septembre, ou le contenu du plan d’économies budgétaires. Désormais, tout est centré sur la survie de Bayrou, c’est lui qui est au centre du jeu, et ses adversaires vont devoir se positionner en fonction de lui et de ce vote de confiance.
Le choix du moment est habile, car si on sent que les oppositions à certaines mesures d’économies commencent à monter, rien n’est encore cristallisé. Bayrou peut donc lâcher du lest, en ayant pris le lead sur la négociation. C’est qui a fixé la date butoir pour un deal (avec le RN), et on sait globalement que ça va porter sur la proposition de suppression de deux jours fériés, et quelques autres mesures à très forte teneur symbolique, sur la fiscalité des riches. La négociation ne fait que commencer, et va sans doute durer jusqu’au 8 septembre, où Bayrou peut se permettre de donner ses arbitrages pendant la déclaration de politique générale. Compliqué, pour les autres partis (notamment à gauche), de devoir réagir à chaud, sur des annonces qu’on découvre en live. Bayrou est véritablement le maitre des horloges, et en politique, c’est très important.
Si elle réussit et que le RN s’abstient, permettant au gouvernement de survivre, c’est une victoire politique pour Bayrou. Il sera en effet difficile, pour les partis qui n’auront pas voté contre, de changer de pied, un mois plus tard, lors de l’examen du budget, et de censurer sur un éventuel recours à l’article 49.3. Une survie, inespérée, serait un coup de massue pour l’opposition de gauche, qui fera une fois de plus la démonstration de son impuissance à changer le cours des choses, et ne pourra qu’accentuer les fractures internes, entre LFI et les autres.
En cas de défaite, c’est la crise politique, et il faudra que les partis qui l’ont provoquée l’assument (surtout si Bayrou a fait de grosses concessions en toute dernière minute). De toute manière, quel que soit le gouvernement qui lui succède, il ne pourra pas faire autrement que reprendre l’ossature de son projet de budget, car il est impossible de le réécrire complètement. Aucune coalition parlementaire alternative n’est possible, on ne pourra que dissoudre ou chercher un autre Premier ministre au sein du bloc central, qui ne sera que la continuation du gouvernement Bayrou.
En tout cas, François Bayrou aura fait la démonstration qu’il est un véritable animal politique, espèce de plus en plus rare dans notre paysage institutionnel. S’il doit finalement partir, ce sera avec un certain panache !
5 réponses sur « Le coup de poker de Bayrou »
Quelles concessions quand tout le monde réclame plus de dépenses et voit dans toute baisse des recettes des cadeaux ?
Mais voyons les riches paieront (axiome de gauche) et l’on fera des économies sur le dos des étrangers (axiome RN) Sipmle non !
Bonsoir. Pour moi Bayrou n’est pas un « maitre des horloges », mais juste un « condamné qui avance la date de son exécution ». Parce que quelles concessions pourrait-il faire?
Abandonner son projet de suppression de 2 jours fériés? De toutes manières cette mesure n’était qu’un chiffon rouge qui avait pour but de disparaitre afin d’être présentée comme une « concession ». Et, comme en France il n’y strictement aucun journaliste cela a bien marché. La preuve aucun média n’a décrit les impacts de la notion « d’année blanche ». Aucun média non plus n’a rappelé que ces 44 milliards correspondent aux cadeaux fiscaux de Macron. Pour rappel, l’ISF c’est – 2milliards, la taxe d’habitation c’est -24 milliards. Donc, rien que là nous sommes à 2/3 des 44 milliards.
rétablir l’ISF? Possible. Mais cela ne représentera que 2 milliards, comme indiqué, de recettes supplémentaires. Et si c’est au prix de la souffrance des plus fragiles, ce prix me semble particulièrement élevé.
A cela s’ajoute, pour les députés qui voteraient la confiance, le coût politique. Si le « 10 Septembre » devait prendre, les manifestants auraient de grands risques d’attaquer celles et ceux qui n’auraient pas fait tomber Bayrou. Et s’il ne prend pas, Janvier 2026 va correspondre à une période où des salariés vont découvrir qu’il leur est impossible d’accepter les évolutions professionnelles, et/ou de salaire que leur propose leur employeur. Car en le faisant il perdraient le double ou le triple en prestations sociales. Croyez-vous qu’aux municipales ils porteront alors leurs voix sur les partis qui ont accepté cela, et ce alors qu’ils affirmaient les défendre? Et que penser d’un gouvernement qui affirme « défendre le travail », et qui au final prend des mesures qui transforment le revenu du travail en une perte de revenus?
Quand à « Bayrou, animal politique » cela m’a bien fait rire. Vous vous êtes intéressé à ses interventions sur YouTube? Du vide quasi intégral. Strictement aucun argument étayé. Et zéro réponse aux commentaires des internautes. Ce alors qu’il affirmait vouloir établir le dialogue avec les français.
je vous souhaite bien du courage pour expliquer aux français qu’il faut rétablir la taxe d’habitation, et tant que nous y sommes la tranche supprimée par Hollande. On peut rétablir la TVA dans la restauration, la redevance Télé et la vignette automobile.
Et dire que certains à gauche nous expliquent qu’il faut voter contre ce budget d’austérité (-4,6% de PIB !!)