LFI vient de refuser d’accréditer un journaliste du Monde, Olivier Perou, pour son évènement de rentrée, des Amfis. Celui-ci étant le co-auteur du livre « La Meute », on peut effectivement comprendre qu’il ne soit plus trop en odeur de sainteté du coté de la Mélenchonie.
Bien évidemment, tous les journalistes vont embrayer sur l’atteinte à la liberté de la presse, soulignant le fait que jusqu’ici, seul le RN faisait le tri dans les journalistes.
Je suis plus partagé. C’est effectivement problématique que des partis politiques se permettent de « choisir » les journalistes qui traitent de leur actualité. Mais les journalistes ont également leur part de responsabilité, et la manière dont ils exercent leur métier peut les exposer à des mesures de rétorsion qui peuvent se comprendre.
Dans ce cas précis, je peux comprendre la réaction de LFI. Le livre « La Meute » est une enquête (lourdement) à charge contre le fonctionnement du parti. Il a été écrit par un journaliste qu’ils connaissent, qui a souvent couvert leur actualité, et qui donc les connait bien. Il a du recevoir des confidences, des off, parce qu’une forme de relation de confiance se noue entre le journaliste et le terrain qu’il couvre. Cela n’est pas sans risque, dans les deux sens. Un journaliste peut se faire « capturer » par le terrain qu’il couvre, et se transformer en porte-parole, plus qu’en observateur impartial. A l’inverse, le journaliste peut se faire procureur, et faire dans la démolition et la dénonciation, ce qui peut être vécu comme une trahison de la confiance donnée, par la structure concernée. Dans les deux cas, la solution qui s’impose est que le journaliste passe à autre chose. Dans les journaux ayant encore une déontologie, les mouvements sont automatiques : on ne peut pas rester plus qu’un certain nombre d’années sur un secteur. C’est une très bonne chose.
Le Monde aurait du comprendre qu’après la publication de « La Meute », Olivier Perou était complètement carbonisé chez LFI, et qu’il fallait le transférer dans un autre service, ou a minima, sur un autre segment politique. Faire en sorte qu’il continue à suivre LFI est une erreur de la part de la direction du Monde, et a pu être ressenti comme une provocation chez LFI.
Les journalistes sont tout à fait légitimes à écrire des livres-enquêtes à charge. Mais ils doivent en accepter les conséquences.
2 réponses sur « Journaliste ou procureur, il faut choisir »
Il est bien dommage que ces partis réagissent d’une telle manière. Vous avez bien raison de souligner qu’un journaliste qui suit un parti noue, au fil du temps, une relation de confiance avec ses membres. Presque comme un ami. Et le jour où il expose ses travers, qui plus est à charge, le parti se sent trahi.
Mais je crois qu’en 2025, il est largement temps pour les partis d’évoluer. Ce que je réclame, c’est des partis capables de faire leur propre critique et de prendre en compte celles qui leur sont faites. Et qui de mieux qu’un journaliste qui suit un parti pour exposer ces critiques ?
La maturité, c’est dire qu’on a entendu ce qui ne va pas pour les autres, s’interroger et exposer les raisons de changer… ou de ne pas changer !
Quasiment tous les partis actuels font l’inverse : nier sans cesse les critiques qui leur sont faites et considérer toute voix s’opposant à eux comme celle d’un ennemi à abattre. Comme une guerre où ceux qui ne sont pas de votre avis sont contre vous, dans un combat à mort. C’est pathétique, et je crois que je ne suis pas le seul français à en avoir assez de cette posture.
Rejeter et bloquer ces journalistes est un aveu de faiblesse. Croire qu’on peut gagner l’opinion en rejettant ceux qui la font est erreur fondamentale. Tant mieux puisque les partis en questions sont des partis extrémistes dangereux pour notre pays.
LFI est davantage un secte qu’un parti politique. Le livre « La Meute » décrit très bien les choses. Son auteur est donc bien placé pour savoir comment LFI réagirait s’il souhaitait couvrir leur évènement de rentrée.