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La réformette des retraites

Depuis quelques semaines, la vie politique et médiatique française se focalise autour de la réforme des retraites. J’ai un peu de mal à comprendre cet engouement, car quand on regarde sur le fond, c’est une petite réforme, purement financière et paramétrique. Elle n’est en rien systémique, comme pouvait l’être celle de 2020 avec la basculement vers un système par points.

Quand on regarde ce que propose le gouvernement Borne, c’est essentiellement de décaler l’âge de départ, afin d’assurer un équilibre financier. L’argument s’entend, notre système par répartition étant très sensible aux évolutions démographiques. Si le nombre de bénéficiaires augmente (la durée de vie est plus longue) et que derrière, du fait d’un creux démographique dans les naissances, on risque d’avoir moins de payeurs, il faut bien réajuster le système. C’est d’ailleurs pour cela qu’on a régulièrement des « réformes des retraites ». Cela peut certes être désagréable de voir sa charge financière augmenter, ou sa pension de retraite s’éroder, mais il n’y a aucune surprise pour ceux qui connaissent un tant soit peu le système (qui ne peut pas avoir que des avantages pour tout le monde). En tout cas, il n’y a rien à mes yeux qui ne justifie vraiment d’aller jusqu’à bloquer le pays, à moins que tout cela ne soit le prétexte à l’expression d’une opposition purement politique et idéologique (mais c’est un autre sujet).

Mais on ne touche pas (pour l’instant) aux fondamentaux du système, et en particulier sa base, son caractère universel et obligatoire. Oui, notre système de retraite est une pyramide de Ponzi, mais elle tient car elle est obligatoire, et maintient à la marge les systèmes de retraite par capitalisation. Vous pouvez parfaitement vous faire votre complément de retraite, à coté du système par répartition (on peut même prévoir quelques aides fiscales) mais c’est en plus, et en aucun cas en remplacement du système par répartition. Tant que ce verrou tient, je ne suis pas inquiet pour l’avenir, et je sais que j’aurai une retraite dont le montant dépendra uniquement de la situation de la démographie (le rapport cotisant/ayant-droit) avec quelques corrections financières pour équilibrer la répartition de la charge.

Contrairement à 2020, les modalités de calcul des droits à pension ne sont pas concernés. Ce débat est intéressant, car il ouvre celui des inégalités de carrières, et propose des formules permettant une souplesse dans les rattrapages de ceux qui n’ont pas pu, pour une raison ou une autre, cotiser suffisamment à un moment de leur carrière, pour atteindre les critères leur permettant de toucher une retraite à taux plein. Cette fois-ci, on n’a même plus de ce débat.

J’ai donc suivi ce sujet avec une assez profonde indifférence, et un paquet de popcorn, car tout cela relevait beaucoup plus du spectacle que du débat de fond. S’il y a pu y avoir des débats de fond intéressant sur l’emploi des séniors et la souffrance au travail ou encore les choix de vie, tout cela ne valait pas le grand barouf politique et médiatique qui a été fait.

26 réponses sur « La réformette des retraites »

> Si le nombre de bénéficiaires augmente (la durée de vie est plus longue) et que derrière, du fait d’un creux démographique dans les naissances, on risque d’avoir moins de payeurs, il faut bien réajuster le système.

L’argument est incorrect sauf à compléter par « à productivité constante ».

Oui, il y a aussi l’enjeu de productivité, mais indirect. Le système n’est pas organisé pour que les gains de productivité soient automatiquement affectés, au moins en partie, dans le paiement des pensions. Pour ça, il faut jouer sur le paramètre de l’augmentation des cotisations sociales, ou trouver d’autres modes de financement.

Bonjour,
Absolument, et c’est un point majeur.
La productivité augmente plus vite que l’érosion du nombre de payeurs ne diminue le gâteau commun.
Mais où donc disparait cet argent? Dans la rémunération du capital bien entendu, qui s’accroît régulièrement au dépens de la rémunération du travail…
La question est en fait beaucoup plus complexe et touche donc à mon avis bien plus à la répartition capital/travail de la valeur ajoutée qu’à un simple problème démographique.

Ne négligeons pas le véhicule législatif qui a, par construction, contraint cette (non) réforme. (et, pour être précis, un système en répartition n’est une pyramide de Ponzi que dans des conditions asymptotiques très particulières).

Cher Authueil, je vous trouve très égoïste dans votre approche du sujet. Si pour vous, ou pour moi (je suis cadre), le décalage de l’âge de la retraite sera indolore (pour avoir une retraite de base à taux plein, je dois de toutes manières travailler jusqu’à 65 ans). Ce n’est pas le cas de tout le monde. Or, pour rappel, l’espérance de vie d’un ouvrier, selon l’INSEE, est de 70ans. Et un peu moins de 30% (toujours selon l’INSEE) seront décédés avant ces fameux 64 ans. Et là je ne parle que de l’espérance de vie, si je parlais de l’espérance de vie EN BONNE SANTE, ce serait encore pire comme situation.

Autrement dit, l’augmentation de l’âge de départ à la retraite consiste ni plus ni moins, à faire payer aux pauvres la retraite des riches. Et ce n’est pas les 2 ou 3 mesurettes « correctives » qu’est supposé contenir cette loi, sous réserve qu’elles ne soient pas considérées comme des cavaliers législatifs par le Conseil Constitutionnel, qui corrigeront cela.

J’ajouterai qu’il ne faut pas oublier que les cotisations retraite sont actuellement calculée jusqu’au plafond de la Sécu, soit un peu plus de 3000 euros/mois. les salaires au-delà de ce montant, placé (comme par hasard???) au point d’inflexion de la courbe des salaires ne sont donc pas soumis à cotisation. D’après mes calculs, toujours à partir des données INSEE, cela représenterait quand même 3 milliards d’euros par an de manque à gagner pour le système. Preuve supplémentaire que notre système « par répartition » consiste maintenant à faire payer les pauvres pour les retraites des riches.

Je suis d’accord avec les réactions ci-dessus. Alain se trompe toutefois en disant qu’il DOIT travailler jusqu’à 65 ans : Alain pourra choisir de partir avant, et verra simplement sa pension diminuer. Si Alain est un haut cadre, ce ne sera pas nécessairement bien douloureux, d’autant qu’il a déjà fini de payer son logement. Les ouvriers et petits employés auxquels Alain pense, eux, n’auront pas cette option, et auront encore un loyer à payer.
Ils vont être plus nombreux à mourir avant d’avoir perçu leur première pension, et encore plus nombreux à ne pas POUVOIR travailler jusqu’à 64 ans [65 bientôt], et à voir leur revenu et plus tard leur maigre pension diminuer encore. Dans ses petits tableurs Excel, Borne a dû calculer combien « ça va nous rapporter ».
Authueil et ses lecteurs ont/vont tous complété/er leur pension par des « placements » : pour nous tous, la pension n’est déjà plus qu’un à-côté. En empêchant les gens bien payés de cotiser sur tout leur salaire, Macron a fini de décorreler les intérêts des mieux payés de ceux des autres. Nous allons avoir une retraite à l’anglaise, presque suffisante pour ne pas crever, ou pas tout à fait. Ou pas tous. Et des compteurs à pré-paiement pour l’électricité chez presque tous les vieux qui n’étaient pas cadres. (En fait, certains les ont déjà !)
A propos du nombre de cotisants / bénéficiaires : on s’en fiche. Ce qui compte c’est la masse d’argent qui peut être consacrée aux pensions. Quand nos bons gouvernants nous parlent de ce taux, ou de part du PIB, ils oublient toujours de préciser combien d’argent on a pour les retraites, et combien il en reste pour d’autres choses. Si on a deux fois moins de cotisants qui cotisent trois fois plus grâce aux gains de productivité, ça fait à la fois plus d’argent pour les retraites, et plus pour d’autres dépenses. Si on consacre 14% d’un PIB de 100, ça fait 14 ; si le PIB grimpe à 200, ça fait 28. Si on fait en sorte que tous les vieux (45 ans et +) qui veulent travailler le fassent effectivement, on va finir par avoir bien trop d’argent, la tuile ! A moins qu’il y ait quelqu’un qui continue à vider les caisses. On finirait par croire que vider les caisses est un objectif, ou un moyen pour atteindre un objectif qui n’est pas mentionné.

Alain38,

dans le régime obligatoire des salariés, les salaires au-dessus du PASS ne cotisent pas, mais dans le même temps, la pension ne dépassera pas la moitié du PASS.
De plus, il y a un système de cotisation déplafonnées qui ne crée aucun droit.
Au-delà, c’est l’AGIRC-ARRCO, qui est un système à points, jusqu’à 8 fois le PASS.
Donc en fait ce que vous dites est faux, et ce que vous préconisez existe, c’est la « cotisation déplafonnée », qui est en fait une taxe, puisqu’elle ne génère aucun droit.

Cher Authueil, je vous trouve dans la droite ligne du discours de la droite.
Ce n’est pas une réformette pour les personnes qui doivent travailler 2 ans de plus et qui font un travail déjà pénible. La France n’a jamais été aussi riche, le PIB aussi élevé, où sont passés les fruits des gains de productivité? au début des années 80 on penser abaisser l’âge légal de départ. Où est le progrès?

Les gains de productivité sont visibles partout dans la vie courante : la baisse de la part de l’alimentation dans le budget des ménages, la durée des vacances, le temps et le budget des loisirs, le nombre de mois de salaire pour acheter une voiture…
Actuellement, la France est riche (bien que vivant au-dessus de ses moyens quand même) mais sans matière première, une agriculture bridée de partout, sans industrie et une population vieillissante, il n’est pas certain que ça dure.

Tous les indicateurs que vous signaler sont plutôt en baisse ces dernières années, montrant une stagnation, si ce n’est une baisse du niveau de vie. Et c’est assez bien perçu par les intéressés…

oui, je répondais à long terme au commentaire qui évoquait les années 80.
Et oui, les indicateurs que j’ai indiqués ne sont pas en croissance ces derniers temps mais on est loin d’avoir perdu le bénéfice des 40 années passées.

Authueil, depuis 15 ans qu’on se connaît je crois que je n’ai jamais été plus en désaccord avec toi 😀

C’est peut-être libellé comme une réforme des retraites, mais c’est une réforme qui interroge surtout le sens et la place du travail dans nos sociétés, et de manière générale la solidarité au sein de la société française.

Deux ans de travail en plus pour un cadre, ce n’est pas la même chose que 2 ans de plus pour un ouvrier.

Surtout quand cette augmentation peut devenir optionnelle pour des cadres qui pour certains peuvent choisir de partir avant le taux plein en compensant avec les compléments de retraite… par capitalisation. Et en plus il me semble que ces compléments de retraite ne sont pas chargés. Quand ils ne sont tout simplement pas offert comme un avantage par l’employeur (coucou la retraite chapeau).

Deux ans de plus pour une retraite à taux plein quand 30% des cotisants sont déjà morts avant de toucher leur première pension avec le système actuel, ce n’est absolument pas anodin.

Deux ans de plus à travailler pour les jeunes générations afin de financer la retraite des générations qui ont contribué à laisser une planète en bordel et qui rechignent d’ailleurs à modifier leur mode de vie, ce n’est pas anodin.

Le gouvernement Borne et Macron ont sans doute cru qu’ils pourraient positionner cette réforme comme une discussion technique et budgétaire, et ils prennent le retour de flamme d’une partie de la société qui les challenge sur les questions de justice sociale. Eh ben c’est fichtrement mérité et pourvu que ça s’enlise encore plus.

Du reste, si on veut redescendre à un niveau techno et budgétaire, actionner uniquement le levier du nombre d’annuités pour pérenniser le financement du système, c’est 0 niveau créativité budgétaire. Il y a plein d’autres façons de le financer mais BLM passe en mode TINA…

Pour très bien connaître le sujet des retraites, je suis parfaitement d’accord avec l’auteur du billet et je n’en redoute que davantage les postures de beaucoup qui ne se soucient des ouvriers que lorsqu’on parle de retraites, et se laissent avoir par des slogans très trompeurs (les 25% de morts avant la retraite chez les pauvres c’est un chiffre faux et qui de toute façon ne voudrait rien dire dans ce débat actuel ; le taux de chômage des seniors n’est absolument pas stratosphérique ; les gens qui partent aujourd’hui à 62 ne sont ni les ouvriers ni les plus pauvres, mais une certaine catégorie d’insiders qui a réussi à valider tous les bons trimestres)

Quand on a un tout petit peu regardé les pays étrangers, on voit qu’ils ont réussi à avoir un très bon taux d’emploi des seniors, à produire plus collectivement, à aménager les conditions de travail ou à favoriser les reconversions. Parce qu’il n’ont pas ce terrible rapport catholique au travail vu comme un purgatoire qu’il faut endurer (sans pouvoir changer quoi que ce soit à ses conditions) avant le paradis de la retraite. Et qu’en ne dépensant pas 14% du PIB et 1/4 des dépenses publiques en pensions, ils arrivent vieux à investir dans l’avenir ou l’éducation. Et que la solution ne passera pas par une énième hausse de cotisations ou un ISF indolore sur les yachts. Bref, en finir avec fatalisme et démagogie

Il me semble qu’il ne suffit d’affirmer une posture d’autorité sur le sujet pour dire « le chiffre est faux » pour en faire un argument.
En quoi serait-il faux ?

De plus, écarter d’un revers de main les problèmes actuels de justice du système de retraite (comment des personnes peuvent-elles décemment vivre avec moins que le seuil de pauvreté comme pension ?). Sans parler des effets futurs de cette réforme si elle voit le jour, sachant que rien n’est prévu pour compenser le problème (au contraire, ils ont par exemple détruit l’assurance chômage, notamment de longue durée).

C’est aussi facile d’écarter les critiques en prétendant que les ouvriers et les travailleurs pauvres en général existent et savent pointer les problèmes qui les concernent eux-mêmes, merci.

1/ le chiffre de 25% de mortalité pour les 5% les plus pauvres correspond à des individus fictifs qui auraient passé *toute leur vie* dans les 5% les plus pauvres. Donc ça ne correspond à rien, et en tout cas certainement pas à des personnes qui auraient travaillé toute leur vie et seraient éligibles à une retraite à 62 ans. Au mieux ils la prennent à 67 ans. C’est pas que moi qui le dis, c’est aussi Michael Zemmour, qui essaie d’aller plus loin que des slogans simplistes https://blogs.alternatives-economiques.fr/zemmour/2022/12/14/quels-chiffres-utiliser-pour-parler-de-la-difference-sociale-d-esperance-de-vie-et-de-la-retraite

et 2/, sur le seuil de pauvreté, il vous aura sûrement échappé que l’allocation de solidarité aux personnes âgées est de 960 euros par mois et donc au dessus du seuil de pauvreté à 50% du revenu médian. A partir de 65 ans, ou plus tôt en cas d’invalidité. Oui, c’est une allocation différentielle récupérable à la succession, certes.

Mais vous illustrez, inconsciemment j’en suis certain, ce biais de beaucoup de gens à parler des retraites les plus faibles et de la pénibilité de certains métiers pour réclamer le droit des carrières complètes à partir toujours très tôt. Alors que ce sont 2 catégories diamétralement opposées. Rhétoriquement vous utilisez les précaires outsiders du système pour en défendre les insiders. Que les syndicats se soucient de défendre les carrières longues et complètes c’est leur rôle, mais ce sont les avantages acquis d’une minorité, et il est nécessaire de déconstruire ce discours.

Réponse sur le point 1 :

À vous lire Dedenn, on croirait que Michael Zemmour démonte les « slogans simplistes » profanés tout azimut par des oppositions décidément trop bêtes pour comprendre l’économie… Allons ensemble au delà des postures et lisons ce que Michael Zemmour a à nous dire dans cet article.

Il énonce d’abord que, du fait de détails barbant de méthodologie, le chiffre de l’INSEE repris par Libération est difficilement interprétable. Puis il énonce le chiffre correct : avec cette réforme, 15% des hommes de 50 ans qui sont sous le revenus médians, ne vivront pas jusqu’à leur retraite.

La belle affaire ! On corrige donc « Actuellement, 25% des 5% les plus pauvres meurent avant la retraite » en « Avec cette réforme, 15% des 50% d’hommes les moins bien payés à 50 ans mourreront avant leur retraite »… C’est pire, non ?

Je suis ici rentré dans votre guerre des chiffres pour rectifier un détail pas vraiment signifiant, mais j’aimerais en sortir un instant : ces arguties arithmétiques sont dans le fond révélatrices d’une vision réductrice de cette réforme, qui n’est pas un simple ajustement paramétrique.

Avec cette réforme, on touche aux trois piliers les plus sacrés de notre psyché : le flouse, la famille, et la mort. On attaque les tripes, on clive, on fait de la vraie Politique, pas du bilan d’expert comptable. Ne pas comprendre cela, mener une rhétorique (perdue) sur les chiffres, c’est pour moi le signe d’un gouvernement déconnecté… Ce qui n’augure rien de bon. Les troubles à venir sont intégralement la responsabilité de Macron, qui se contredit à quelques années d’intervalle sur l’âge de départ à la retraite, et ressort un sujet « froid », de temps long, en contexte d’inflation et de guerre aux portes de l’Europe. Incompréhensible.

PS : Au passage, l’article que vous avez lié donne d’autres chiffres tout aussi choquants que celui que j’ai repris. C’est un bon article pour ceux qui aiment les détails, et je vous remercie de l’avoir mentionné.

Macron a peut-être la pression de l’union européenne pour passer cette réforme.
Ça rend sa décision moins incompréhensible.

> Si le nombre de bénéficiaires augmente (la durée de vie est plus longue) et que derrière, du fait d’un creux démographique dans les naissances, on risque d’avoir moins de payeurs, il faut bien réajuster le système

(à productivité constante donc, ou qui ne compense pas le changement, comme dit ailleurs)

> En tout cas, il n’y a rien à mes yeux qui ne justifie vraiment d’aller jusqu’à bloquer le pays, à moins que tout cela ne soit le prétexte à l’expression d’une opposition purement politique et idéologique (mais c’est un autre sujet).

Il me semble qu’il y a deux problèmes significatifs dans ce raisonnement.

Tout d’abord, vous présentez le fait qu’il faille « réajuster » (admettons, même si ce « besoin » reste assez hypothétique vu les scénarios du COR) de ce manière comme une évidence, alors qu’on a bien d’autres modes de financements qu’augmenter l’âge de départ – augmentation qui creusera de gros trous ailleurs, en chômage, assurance maladie, minimas sociaux…(pour ne parler des finances).
Or il y a bien d’autres moyens de réajuster l’équilibre financier du système, au hasard sur les cotisations patronales et notamment celles de l’Etat pour les fonctionnaires (grand pan de cette réforme, creuser le déficit de ce côté là). Moyens qui seraient beaucoup plus indolores pour la majeure partie de la population. Ce qui pose effectivement un débat de fond sur l’équité du système.

Ensuite, justement c’est une opposition idéologique, mais de fond et beaucoup plus globale. Ça ne cristallise pas les tensions d’une très large part de la population pour rien : derrière les retraites, il y a tout le rapport au travail monétarisé et tout le système social qui se déroule.
Il y a notamment la question du « bonheur différé » (https://www.philomag.com/articles/retraite-la-fin-du-bonheur-differe-par-denis-maillard) que représentent les retraites, et avec une augmentation constante de l’intensité et de la dureté du travail, un refus de ce sacrifice là qui s’exprime. C’est un débat de fond *total* autour du modèle social, du rapport au travail, des conditions de travail en particulier, etc.
Donc oui, il y a tout un débat idéologique de fond *très large* qui est provoqué par cette contre-réforme.

Ramener cela à une simple mesure paramétrique obligatoire et échapper tout le débat d’un simple « il ne peut pas y avoir que des gagnants », et ne voir dans l’opposition très largement partagée au projet un simple « prétexte » à manœuvre politicienne, me semble passer totalement à côté du sujet.

Je rajouterai que tout ce (non) débat ne tiens aucun compte que l’espérance de vie en temps de changement climatique et d’infections covid répétées ad vitam (tendance actuelle) est plutôt partie pour s’effondrer qu’autre chose.
Personnellement, si le modèle c’est plus de 40 années de sacrifice pour une hypothétique retraite en étant cassée par le salariat sous un monde à +3°C, ça sera sans moi. Et ça justifie « un peu » de poser un rapport de force (« bloquer le pays ») pour arracher un autre modèle (très, très au delà des simples retraites).

J’entends vos remarques, sur les réformes du système uniquement construites à partir des attentes et espoirs des salariés. Malheureusement, se pose toujours, à un moment, la question du « est-ce qu’on en a les moyens ? » et « qui paye ?. Et là, il faut revenir sur terre, et surtout, prendre en compte l’intérêt de tout le monde, pas seulement de ceux qui ont entre 45 et 55 ans, et ont envie de s’arrêter, parce que rentier, c’est quand même plus épanouissant.

Le problème actuel c’est que beaucoup des rentiers ne sont pas ceux que vous dites.

La vidéo de Mitterrand expliquant que grâce à lui, on peut enfin « commencer à vivre » à 60 ans résume bien toute cette posture. On a créé un droit à être rentier à partir d’un certain âge alors qu’on est encore en bonne santé. Et tant pis si ça engloutit une fraction croissante des prélèvements obligatoires. Depuis 40 ans, les dépenses régaliennes et d’investissement (éducation, énergie, transports) baissent en parallèle de la hausse des dépenses de retraite, l’effet d’éviction entre les dépenses est très net

@Pierre:
« Je rajouterai que tout ce (non) débat ne tiens aucun compte que l’espérance de vie en temps de changement climatique et d’infections covid répétées ad vitam (tendance actuelle) est plutôt partie pour s’effondrer qu’autre chose. »

Jusqu’à présent, l’espérance de vie ne s’est pas vraiment effondrée, elle est plutôt très stable ces dernières années. A la rigueur elle plafonne (à 85 ans pour les femmes et 79 ans pour les hommes), mais même en 2020 et 2021 avec le Covid.

« Personnellement, si le modèle c’est plus de 40 années de sacrifice pour une hypothétique retraite en étant cassée par le salariat sous un monde à +3°C, ça sera sans moi. Et ça justifie « un peu » de poser un rapport de force (« bloquer le pays ») pour arracher un autre modèle (très, très au delà des simples retraites). »

Reste la question: « qui paie » ?
– En système par répartition comme en France (pour la quasi totalité des régimes obligatoires), ce sont les actifs (salariés, indépendants,…) qui paient pour l’ensemble des retraités. Donc s’il n’y a pas assez d’actifs par rapport aux pensions à verser, soit il y a un déficit, soit, dans le pire cas, le taux de cotisation est excessivement élevé.
Un exemple fictif et théorique: si tout le monde est au SMIC (net) et que le taux de remplacement est de 80%, s’il y a 1.5 actif pour 1 pensionné, ça veut dire que la cotisation retraite représente 53% du SMIC!
Après, on peut toujours essayer de trouver d’autres ressources, encore faut-il qu’elles soient:
– suffisantes en montant
– pas trop variable
– et viables sur la durée.

Après, on a le droit de vouloir un autre modèle. Mais lequel ? A part faire payer « les autres », je n’ai vu aucune proposition. Enfin si, les écolos décroissants qui croient que la vie sera plus rose en faisant un peu agriculteur, un peu chambre d’hôte, un peu de vente sur les marchés. modèle qui peut plaire à certains mais qui en aucun cas ne peut être généralisé à l’ensemble de la société.

Vous résumez très bien, dans votre dernier paragraphe, la posture d’un certain nombre de contestataire : « un autre monde est possible » mais ils sont bien incapables de le décrire.

En commençant par récupérer les 20-25 milliards de TVA qui sont payés par les clients mais qui n’arrivent jamais dans les caisses de l’Etat, on doit déjà payer qqs retraités ?
Arrêter de faire exprès des trous là où on voudrait voir des bosses peut être une idée aussi (exonérations de toutes sortes).
Encourager les riches à payer effectivement leurs impôts au taux prévu pour les riches, plutôt que de concevoir, pour eux exclusivement, des niches fiscales qui leur permettent de payer au taux effectif de 14% (ce qui n’empêche pas les bénéficiaires de râler contre la pression fiscale).
Essayer de comprendre pourquoi beaucoup d’argent entre dans le système, et peu arrive là où il y en a besoin. Quand on a des budgets de l’EN comparables à ceux d’autres pays mais que les établissements qui reçoivent élèves et étudiants sont pauvres et que les personnes qui y travaillent sont beaucoup moins payées qu’ailleurs, on peut finir par se dire qu’il y a matière à réflexion.
En ce qui concerne les retraites, on verra bientôt que l’argent que nous n’avons pas pour les faire fonctionner par répartition se trouvera pour les faire fonctionner par capitalisation. Il y aura des bénéficiaires, mais ce ne seront pas forcément les retraités.
Pour la TVA, Darmanin a annoncé la création d’un Grand Machin il y a des années. On n’en a plus jamais entendu parler.
Il faut croire que la situation actuelle convient parfaitement à certains. Surtout, ne rien changer pour ne rien changer.

Les retraites ne sont pas censées être financées par l’impôt, mais par les cotisations. Votre commentaire est hors sujet.

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