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Surveillance et Libertés, ne nous trompons pas de combat

L’actualité nous réserve parfois des télescopages fortuits, mais finalement très révélateurs. Le gouvernement français présente ce lundi 19 juillet un projet de loi poussant à l’obligation vaccinale, et un autre portant « diverses mesures de sécurité » rétablissant des dispositions censurées par le conseil constitutionnel pour atteinte aux libertés. Dans le même temps, plusieurs titres de presse, dont Le Monde, révèlent un scandale de surveillance des téléphones portables, rendu possible par une technologie à la portée de nombreuses dictatures.

Pour commencer, aucune des deux annonces n’est réellement une surprise. Les forces de sécurité et les services d’espionnage sont toujours en quête de davantage d’outils, techniques et juridiques, pour faire leur métier. Quand elles les obtiennent, elles s’en servent, peu importe leur légalité. Pas vu, pas pris, et si pris, on verra et on fera valider par une loi, avec aucune condamnation à la clé. Les révélations de Snowden, en 2013, sur l’ampleur de l’espionnage américains, n’ont eu finalement que des répercussions assez faibles au regard de l’ampleur du scandale.

Le fond du problème n’est donc pas l’existence de ces technologies intrusives ou de législations sécuritaires. Quoi qu’il arrive, elles existeront, et dans certains cas, elles sont nécessaires. Le vrai sujet est la capacité des citoyens à fixer les bornes considérées comme acceptables, à vérifier qu’elles ne sont pas franchies, et si elles le sont, à faire en sorte qu’il y ait des sanctions réelles, qui fassent mal, et dissuadent (un peu) les coupables, de récidiver.

Le vrai combat pour les Libertés fondamentales doit porter sur l’institution de contrôleurs bénéficiant de vrais moyens (pas comme aujourd’hui) et de la confiance des citoyens, garantissant que, si des libertés ont été un peu piétinées, c’était vraiment pour « la bonne cause ». Que les téléphones de djihadistes soient écoutés, afin d’éviter un attentat, ça ne choquera personne. En revanche, que des lois prises pour lutter contre le terrorisme servent à empêcher des actions militantes et politiques « normales », cela m’interpelle.

Pour que ce contrôle soit accepté, il faut également que la fixation des limites fasse l’objet d’un véritable débat démocratique, et que les gouvernants écoutent réellement ce qui remonte du pays, y compris quand cela ne correspond pas à leurs positions.

Je suis très favorable à la vaccination contre le covid-19 (et j’ai eu mes deux doses) et je considère que les possibles risques sont négligeables, au regard de la protection que le vaccin m’apporte personnellement, et apporte collectivement, par le biais de l’immunité collective. Mais qu’on trouve 100 000 personnes, un samedi de juillet, pour manifester en France contre l’obligation vaccinale, cela m’interpelle. Même si je suis en désaccord profond avec leur position (et notamment certains de leurs arguments particulièrement indécents), elle ne peut pas, pour autant être mise sous le tapis et ignorée. Le débat politique doit écouter tout le monde (même si c’est pour trancher dans un sens précis, in fine) afin que la décision qui ressorte de ce débat soit la plus acceptable.

Le combat pour les Libertés publiques est donc avant tout un combat citoyen et démocratique, pour fixer les limites, et se doter des outils pour les faire respecter. C’est malheureusement là dessus, tant pour la capacité à débattre qu’à mettre en place des tiers de confiance, qu’on est le plus à la ramasse…

12 réponses sur « Surveillance et Libertés, ne nous trompons pas de combat »

Je ne suis pas sûr que tous les manifestants soient contre l’obligation vaccinale. Selon moi, une minorité est contre le pass sanitaire uniquement.
Je suis également vacciné, mais la version du pass « proposée » par le Président ne me convient pas. Ces mesures me paraissent disproportionnées et assez hypocrites: sanctions pénales pour des acteurs de secteurs en crise, accés à des informations de santé privées par des personnes qui ne sont pas des soignants, contrôle par des agents de police qui, sauf erreur de ma part, ne seront pas affectés par l’obligation de se faire vacciner…
Vous l’avez évoqué plusieurs fois dans votre blog, il y a également un problème de confiance dans les acteurs de l’Etat: Que va t-il advenir des données collectées ? Le pass sanitaire sera t-il étendu ? Qui contrôlera les abus et quels seront les moyens alloués à ce contrôle ?
Je doute sincèrement de « l’équilibre » des textes législatifs qui sortiront. Et j’ai l’impression que c’est le cas d’une partie des manifestants.

Le vrai problème du dispositif, est qu’il entend arriver aux résultats d’une obligation vaccinale, sans avoir à la décréter. Trop de mesures sont prises en visant un autre but que celui qui est officiellement affiché ce qui biaise le débat public. A cela s’ajoute le problème, très réel, du manque de confiance dans les autorités publiques. Mais ce désaccord sur le dispositif ne devrait pas, à mon sens, amener à manifester avec des antivax assumés, car c’est eux qui vont récupérer le bénéfice politique de la manifestation. Il faut savoir choisir ses combats et ses manifestations, en pesant le rapport coût/bénéfice.

C’est, à mon sens, malheureusement vrai ce que vous dites pour les manifestations… Cela risque encore de créer une frustration et/ou une colère, si on additionne cet aspect avec le débat public biaisé et le manque de confiance que vous évoquez

Il faut arrêter de psychoter sur ce pass sanitaire. une fois une proportion de vaccinés suffisantes il n’aura plus aucun intérêt. Quand aux libertés publiques je rappelle une réalité bien simple: toute liberté s’exerce toujours au détriment de quelqu’un: ma liberté de manifester empiète sur la liberté de mon prochain à vaquer à ces occupations quotidiennes, la liberté de ne pas se vacciner s’oppose à la liberté de ne pas être exposé à la maladie, la liberté d’allumer sa climatisation s’oppose à la liberté de ne pas se retrouver avec une centrale nucléaire pas loin de chez lui. etc…

« […] une proportion de vaccinés suffisante […] » C’est bien là que le bas blesse. Parce que atteindre 90% de vaccinés EN FRANCE n’aura au final que peu d’impact sur la propagation du virus. Puisque le reste du monde restera une « usine à variants ». Et que ceux-ci seront de plus en plus contagieux. Donc, le pass « sanitaire » est voué à rester actif durant un bout de temps. Car après le « variant delta » un autre, encore plus résistant aux vaccins apparaitra, puis un autre, et encore un autre, …

Quand à la « liberté s’exerçant au détriment d’autrui », nous parlons quand même là de suppression de libertés telles que celle de travailler, de se déplacer, d’avoir une vie sociale, etc. L’attaque contre les Libertés ne se fait donc plus dans une optique « Gagner des libertés quitte à en faire perdre un peu à d’autres ». Elle se fait dans une optique « RETABLIR des libertés pour certains, au prix de la destruction des autres ».

je maintiens ce que j’ai dit. Si nous avons 90% de vacciné en France plus besoin de pass sanitaire, le pass sanitaire étant là pour vérifier que la personne est vaccinée. Et si j’en crois l’institution John Hopkins nous sommes à 3.8 milliards de doses de vaccins délivrée dans le monde.
Quand à la defense des libertés j’ai le droit d’aller travailler sans risquer ma vie parce que mon voisin de bureau n’est pas vacciné. Idem en allant faire mes courses.
Aujourd’hui on nous vend la défense des libertés mais il faut regarder la réalité en face. On vous interdit pas de travailler ou de sortir. Mais on vous demande de le faire vacciner. Plus de 4 millions de morts du covid en a peine un an dans le monde. 100 000 morts en France. On cherche les morts par dizaines de milliers des vaccins. il y a trente ans j’ai été vaccinés, pas le choix, lors de mon service militaire. je suis encore en vie..Au contraire je n’ai aucune certitude de survivre à une infection au covid.

Intéressante remarque. Car elle marque bien le niveau de stress qui a été atteint dans la population. Comme vous je suis vacciné. J’ai des collègues qui ne le sont pas. Mais, si l’un d’eux me contamine, j’ai très peu de chance d’en mourir. La vaccination a en effet la particularité de fortement réduire les risques de forme grave. Cela en est au point que dans les pays, comme la France, qui ont une couverture vaccinale déjà importante, la mortalité concerne presque exclusivement des personnes non vaccinées ou n’ayant eu qu’une seule dose. Ce sont les 96% cités par Mr Castex.

En revanche, le scénario inverse est nettement plus probable. C’est à dire que, étant vacciné, je transmette la maladie à un collègue non vacciné. Car, si la vaccination réduit les risques que j’attrape le virus, cette probabilité reste néanmoins élevée.Et donc que ce soit moi qui sois à l’origine de sa mort. Je ne dis pas « responsable » car il aura fait un choix personnel, et donc accepté les risques associés.

Et pourtant, du fait du stress accumulé vous avez uniquement envisagé l’option la moins probable.

Non, au niveau global les non vaccinés sont bien dangereux pour les vaccinés.
Pas directement en raison du point que vous soulevez, mais parce que la poursuite de l’épidémie dans ce réservoir risque de générer des variants résistants à la vaccination.
Il est donc faux de dire « si je ne me vaccine pas, cela ne concerne que moi »

Le non vacciné que vous aurez contaminé n’aura qu’à s’en prendre à lui-même. Ce ne sont pas les avertissements qui ont manqué.

@PANOUF: « De plus, celui-ci explique qu’un vaccin administré dans un pays avec une couverture vaccinale au dessus des 60-70% a désormais un impact bien plus faible qu’un vaccin distribué dans un pays pauvre, d’où l’importance d’approvisionner ces pays.  » (source: https://www.lalibre.be/belgique/societe/2021/07/28/emmanuel-andre-demontre-lefficacite-des-vaccins-en-comparant-plusieurs-pays-prendre-soin-des-plus-fragiles-est-dans-linteret-de-tous-AMLYCHVSNNFRHPMJ4B7MTLPENM/ )
C’est d’ailleurs ce que je disais dans mon premier billet. Truster les vaccins pour atteindre les 90% en France sera peu efficace. Et il vaut mieux donner les vaccins au programme Covax. Au moins jusqu’à ce que la couverture vaccinale mondiale soit élevée.

@XC: Tout à fait. pour cela, comme je l’ai ecrit « je n’utilise pas le terme responsable »

Je suis pour le pass sanitaire, le vaccin est de loin notre arme la plus efficace contre cette horreur de virus. Certaines mesures interpellent, notamment l’article 7 du projet sur la suspension du contrat (et au bout d’un certain temps le licenciement). On se sert du droit du travail pour punir un choix qui relève du la vie personnelle du salarié. C’est franchement discutable

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