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Le wokisme, nouvel eldorado des débats stériles

Notre débat public français est trop souvent pollué par des querelles stériles, basées sur des constructions imaginaires et fantasmées. Elle permettent à des personnalités politiques et/ou médiatiques de prendre des postures valorisantes, sans trop travailler le fond. La nouvelle croisade de Jean-Michel Blanquer contre le « wokisme » en est un nouvel avatar.

Ce mouvement dit « woke », venu des États-Unis, est présenté comme un nouvel épouvantail idéologique, propre à faire peur aux lecteurs du Figaro, qui fait au moins deux articles ou tribunes sur le sujet par semaine. Tous défavorables, bien entendu. A les entendre, ce mouvement est une attaque violente contre l’universalisme à la française, prônant la non mixité, la déconstruction des genres et utilisant (Vade retro satanas) l’écriture inclusive avec point médian.

Une telle vision n’est pas totalement dépourvue de fondements, mais jette allègrement le bébé avec l’eau du bain, en assimilant un mouvement de fond aux excès de certains de ses partisans, et à l’expression culturellement anglo-saxonne de ses manifestations.

La base de ce mouvement est la prise de conscience des discrimination, et le refus radical des rapports de domination que sous-tendent ces discriminations. Nous sommes là sur l’expression d’une tendance de fond de nos sociétés, celle de la valorisation de l’individu. Par là, j’entends l’importance accordée à la valeur de chaque personne, qui ne saurait subir de brimades ou de dominations injustifiées. Cette logique amène assez naturellement à remettre en question les hiérarchies sociales et les positions de pouvoir, pour davantage d’horizontalité et un combat contre toute forme de domination et de violence interpersonnelle. Cela peut déranger les conservatismes, et ce n’est donc pas si surprenant que cet épouvantail du wokisme fonctionne aussi bien auprès des lecteurs du Figaro.

Ce combat contre le wokisme tient beaucoup de la charge de don Quichotte contre les moulins à vents. Il existe tout de même un point où les partisans de cette idéologie Woke présentent une faiblesse, c’est quand ils se livrent à des actions de violences (même symboliques), pour affronter leurs adversaires, ou faire avancer leur cause. C’est assez paradoxal de prôner le refus des discriminations et des dominations, et de provoquer la perte d’emploi de personnes qui ne vont pas dans votre sens, comme on le voit parfois dans les universités américaines, voire françaises…

Pour autant, il ne faut pas se tromper de combat. Ce sont les méthodes violentes pour entraver les débats qu’il faut combattre, d’où qu’elles viennent. En assimilant une pensée aux méthodes contestables de certains extrémistes, on ne fait pas avancer le débat, on le stérilise. C’est très dommageable, car pendant qu’on s’écharpe sur des totems artificiels, on passe à coté des évolutions de fond, celles qui modèlent réellement la société.

5 réponses sur « Le wokisme, nouvel eldorado des débats stériles »

Je trouve affligeant qu’un Ministre de l’éducation Nationale tombe si bas dans une commémoration officielle…

Même sur Facebook ou les forums de troll on est déjà dans le type de sujet sans intérêt, alors le propulser dans le discours qui se tient au sommet de l’état est juste… affligeant? Désespérant?

Je suis très réservé sur le mouvement de fond que vous décrivez: je pense que sous couvert de bonnes intentions il n’est qu’une arme au service des leaders culturels, et qu’il a deux gros effets néfastes :
1/ donner le pouvoir aux leaders culturels de décider seuls ce qui est une « bonne » ou une « mauvaise » discrimination. C’est un processus déjà avancé, qui n’a absolument pas pour but d’apaiser la société, mais juste de discréditer leurs opposants pour ne pas avoir à leur répondre sur le fond.
2/ à long terme, transformer la société en un chaos d’individualismes égoïstes par l’effacement progressif d’un grand nombre de repères structurants pour tous, sans rien avoir à proposer pour les remplacer.

Sauf que le « wokisme » n’eveille en moi qu’une indifférence profondément ennuyée.

Bonsoir Panouf

Je suis un peu surpris par votre commentaire. Vous supposez que le wokisme a 2 effets néfastes, assez grave. Mais il ne vous laisse qu’indifférent ? Ai je mal compris ?

Vous n’avez pas mal compris, c’est moi qui air mal exprimé ma pensée…

Pour moi le concept de « wokisme » est uniquement une catégorie fourre tout imprécise, une étiquette artificielle destinée à critiquer sans réfléchir, c’est pourquoi l’étiquette m’indiffere complètement.

Je voulais dire « on peut faire des critiques bien plus dangereuses pour le mouvement de fond dont authueil parle, comme » suivi des critiques que j’ai énoncé.
Mais cela nécessite du recul et une réflexion de fond : quelles sont les différences qui structurent notre société ? Pourquoi? Et au contraire, quelles sont les différences injustifiées, et pourquoi?

Se concentrer sur la critique du « wokisme » tue en vous cette réflexion et fais de vous un gueulard sans influence ou danger réel pour ce que vous pensez combattre.
C’est pourquoi si je suis bien contre l’évolution que authueil décrit à savoir la destruction de toute différence, je suis complètement indifférent au concept de wokisme qui est un neutron intellectuel.

Le wokisme ça ressemble drôlement aux valeurs de l’anarchie, je trouve.
Tous différents mais tous égaux. Personne n’est supérieur.
Vu les réactions que l’anarchie provoque chez la classe dirigeante habituellement (suppression dans le sang), ça ne m’étonne pas outre mesure cette « croisade ».
C’est presque modéré, même.

Euh il ne faut pas oublier qu’à l’époque les anarchistes avaient commis des attaques terroristes…
Ça joue dans l’ampleur de la répression!

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