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Laissons sa chance à Barnier

Emmanuel Macron s’est enfin décidé, en nommant Michel Barnier comme Premier ministre. Un choix logique, vu le refus du PS d’accepter une forme de soutien sans participation pour un gouvernement Cazeneuve. De plus, à 73 ans, il est suffisamment « has been » et dénué de charisme pour ne pas inquiéter les prétendants au pouvoir (comme Edouard P.), qui peuvent voir en lui un simple manager de transition, et pas plus.

Il peut compter, du moins dans les premiers mois, sur une base parlementaire assez solide. Les troupes macronistes vont le soutenir et LR ne peut pas s’en désolidariser. Et surtout, le RN semble accepter laisser sa chance au gouvernement Barnier en ne votant pas la censure (du moins pas tout de suite). Ils ont eu aussi, besoin d’un moment de répit pour se réorganiser, et Barnier n’est ni irritant, ni une menace. Cela va lui permettre de relancer la machine administrative, de prendre les décrets, ce qui permet de faire pas mal de choses. Il y aura sans doute une moindre productivité législative, car le fait que le RN ne vote pas les motions de censure ne veut pas dire qu’il votera les projets de loi. Mais mis à part le budget, ce n’est pas bien grave s’il y a moins de lois. Quand on regarde ce qui était discuté entre 2022 et 2024 au Parlement, cela relevait souvent de l’anecdotique.

Le vrai enjeu est sa capacité à ne rien céder au RN sur le fond, et à respecter dans les clous « républicains », malgré les coups de pression et les menaces de censure qui ne manqueront pas d’arriver régulièrement du RN. Pour l’instant, je ne suis pas fondamentalement inquiet, Barnier ayant toujours été un homme d’une droite classique, pro-européenne et modérée, loin de toute tentation extrême. Les épisodes comme la campagne des primaires de 2021, où il a été obligé d’aller draguer l’aile droite des militants LR, ne sont pas représentatifs de ce qu’il est vraiment.

J’attends de voir la composition du gouvernement et le discours de politique générale, mais ce gouvernement Barnier pourrait réserver quelques surprises. A partir du moment où il n’est pas renversé par une motion de censure, il dispose d’une véritable liberté d’action, car constitutionnellement, c’est lui qui dispose de la machine administrative et rend les arbitrages. Le président de la République ne peut pas lui donner d’ordres, il peut juste gêner ou empêcher. Comme en plus, Barnier est en toute fin de carrière, il n’a pas à « ménager l’avenir » et se moque de sa popularité.

Rappelez-vous ce qu’on a pu entendre, surtout venant de la gauche, lors de la nomination de Jacques Toubon comme défenseur des Droits. Au final, il a été excellent et est parti sous les applaudissements de la gauche.

27 réponses sur « Laissons sa chance à Barnier »

Ce choix est déjà une capitulation face au RN.
Barnier n’est qu’un larbin.
L’alliance est là et le message est passé : Macron fera tout pour que jamais la gauche n’arrive au pouvoir, même s’il doit pour cela offrir le pouvoir à Marine Le Pen.

La gauche ne veut pas le pouvoir, elle vit bien mieux dans l’opposition, la critique et la surenchère, Authueil l’a très bien expliqué. Elle a l’impression que c’est sa seule chance d’y revenir avec une majo absolue, pourquoi pas après tout. Dont acte.

De toute façon à part Lucie Castets, tout autre choix ne peut être qu’un homme (ou une femme) de paille aux ordres de Macron ou un larbin du RN…

Pourquoi attendre ? Cela fait 40 ans qu’il est au gouvernement ou à Bruxelles, et on connait déjà son idéologie politique ultra-libérale, une idéologie qui a déjà été rejetée par 80% des français aux dernières élections.

Et encore une fois, Macron nous a fait poireauter pendant deux mois pour nommer quelqu’un dont il avait le nom en tête depuis le début. Et vous êtes vraiment l’un des seuls à croire qu’il avait réellement l’intention de nommer Caseneuve ou Bertrand. Ces noms-là n’ont été distillés dans la presse que pour occuper les médias et faire croire qu’il était à l’écoute et acceptait de négocier avec tous les partis. Mais au final, on se retrouve avec un premier ministre qui avait déjà de fortes sympathies pour Macron, d’ailleurs son fils a déjà travaillé au sein de LREM.

Il ne restait à Macron plus qu’à négocier un accord discret avec le RN pour ne pas être censuré. Mais cet accord risque de faire très mal aux électeurs des deux camps. Ceux qui ont permis à Macron de sauver ses sièges de députés à l’AN l’ont fait pour contrer le RN, tandis que les électeurs du RN ne veulent plus de Macron.

« accès aux services publics, sécurité au quotidien, maîtrise de l’immigration »

Quel besoin d’attendre sa déclaration de politique générale ? Il a déjà fixé ses priorités, et elles sont RN-compatibles. Preuve que sa nomination a été ratifiée par Marine Le Pen sur ces axes programmatiques d’ailleurs.

Le « rempart » contre le RN qui préfère finalement être son marchepied ou son tremplin.

Vous êtes pénible de voir du RN partout. Les priorités que vous citez sont celles de beaucoup de français, au point qu’elles sont quasi consensuelles, même chez beaucoup d’électeurs de gauche.

L’abrogation de la réforme des retraites est aussi consensuelle, vous pensez qu’on la retrouvera dans les « ruptures » annoncées par Barnier, ou on peut déjà retourner dormir ?

La plupart des français se fiche de la reformette sur les retraites maintenant qu’elle est passée, elle ne les concerne pas (sauf s’il travaillent encore et sont nés avant 74).

Par contre l’accès aux service publics et la sécurité ils ne l’ont pas et les veulent.

« l’abrogation de la réforme des retraites » n’est qu’un slogan. Le texte législatif comportait de nombreuses mesures, celle qui est spécifiquement visée, c’est le recul de l’âge. C’est là qu’on voit que ce sujet relève de la comm’ plus que du travail de fond.

« L’abrogation de la réforme des retraites » est aussi demandée par le RN. Preuve que Barnier ne lui a pas cédé sur tout ! 😉

Euh non, lors de la campagne des législatives, le RN a retourné sa veste et avait annoncé que ce n’était plus une priorité.

Mouais. Attendons malgré tout le gouvernement. Mais si c’est Macron + LR + des arrivistes sans aucune ossature idéologique, type S. Royal, le gouvernement sautera rapidement.

Si c’est un gouvernement de purs techniciens on verra ce que cela donne.

Après l’idéal, mais c’est purement utopique, serait un gouvernement large, par exemple avec Mme Castets à Bercy. Mais là, aucune chance je pense.

Si Barnier pouvait être un nouveau Toubon, ce serait une bonne nouvelle.
Mais sa capacité à renier toutes ses valeurs lors de la primaire en 2021, donc à une époque où il n’était pas un jeune premier en politique, est une énorme tache sur son parcours. J’espère que vous vous trompez pour dire que cela ne le caractérise pas au fonds.

Donc attendons. Encore. Le changement, le renouveau, la variation, comme vous voudrez nommer cela, c’est clairement pas pour maintenant. Je vieillis et j’en ai un peu marre d’attendre. Une couche de confiance et d’optimisme vient encore disparaître…

Ah mais contrairement à ce que j’ai écrit (je voulais écrire « j’espère que vous ne vous trompez pas »), j’espère que vous confirmerez vos talents de devin.
Je me souviens très bien de votre billet sur Toubon et vous aviez vu très juste à l’époque.
Tiens c’est amusant Toubon avait 73 aussi quand il a été nommé Défenseur des Droits.

« Comme en plus, Barnier est en toute fin de carrière, il n’a pas à « ménager l’avenir » et se moque de sa popularité.  »

Cela aussi nous verrons. La fin de carrière en France c’est au cimetière et pas avant. Et l’appétit vient en mangeant. Donc si Barnier survit assez longtemps, lui aussi pourrait avoir des idées …

Ohla, j’ai pas dit que le succès est au bout ! 🙂

Mais si l’idée lui vient, il sera un acteur plus important que ce que les autres souhaitent. Et puis, ces derniers temps, on a eu quelques premières …

C’est un exercice très codifié, mais la passation de pouvoir entre Attal et Barnier montre a minima que Barnier n’entends pas être un pantin de Macron – ou alors seulement qu’il n’apprécie pas Attal ? Il a en tout cas clairement installé un rapport de force, qu’il a gagné.

Maintenant, en tant qu’électeur de centre gauche, ma question est: Barnier va-t-il gouverner à droite toute ( comme après chaque Front républicain), ou vraiment tendre la main à la gauche ? Et surtout : va-t-il faire reculer les idées du RN, ou les promouvoir ?

C’est une bonne question, que veut dire « promouvoir » ou « faire reculer » les idées du RN ? Si la question c’est comment transforme-t-on un électeur RN en électeur « autre chose non LFI », il faut bien qu’il se sente mieux représenté par un autre parti qui entend ses problèmes et donne des perspectives plus crédibles d’y répondre… L’équation n’est pas facile. Faire semblant que ces problèmes n’existent pas en parlant d’autre chose n’est intuitivement pas plus efficace.

Exactement. Quand la gauche accuse Barnier de rependre les thèmes du RN lorsqu’il parle « d’accès aux services publics, sécurité au quotidien et maîtrise de l’immigration », il ne faut pas s’étonner qu’il ne reste que des totems vides de sens à la gauche.

Comme il n’y a pas LA droite, il n’y pas LA gauche, mais des droites et des gauches. Rappelons nous les fameuses synthèses.
LFI n’est pas toute la gauche.
Et pour une fois je me rallie à l’auteur : attendons d’abord la formation du gouvernement qui donnera déjà une première direction et le budget qui dira si le premier ministre a réussi ou non à rassembler.
Le temps est gris, ça risque de durer.

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